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Revue de presse

Transplantation : Au cœur de l'insuffisance rénale ; Le ministère de la Santé débloque une enveloppe de 60 millions de DH

Le matin | Maroc | 11/02/2009

Face au phénomène croissant de la maladie rénale chronique, le ministère de la Santé a adopté les grands moyens. Une convention de partenariat doit être signée aujourd'hui jeudi entre le ministère et le secteur privé afin que soient pris en charge quelque 3.000 malades nécessiteux inscrits sur les listes d'attente des 136 centres d'hémodialyse privés et publics existants. La dialyse est certes le traitement le plus couramment prodigué en cas de maladie rénale chronique mais la transplantation représente également une alternative thérapeutique salvatrice. Cette pratique médicale, pourtant maîtrisée au Maroc, reste encore peu répandue en raison de son coût très élevé et du peu de donneurs d'organes disponibles, le plus souvent gênés par des problématiques d'ordre éthique et religieux.

Pourtant la greffe rénale est comparativement à l'hémodialyse moins contraignante et à terme, moins onéreuse. Si une opération de transplantation avoisine les quelque 250.000 DH, le seul coût annuel de la dialyse est de 135.000 DH auxquels s'ajoutent les frais des traitements annexes, portant la facture à 200.000 DH. Une charge financière très lourde dont l'AMO (Assurance maladie obligatoire) ne prend qu'une partie à sa charge, soit 70% du traitement contre 30% assumés par le malade. Mais au-delà des considérations financières, le véritable frein à la pratique de la transplantation, resteraient les réticences psychosociales et religieuses. Bien qu'autorisée par la loi n° 16-98 relative au don et prélèvement et à la transplantation d'organes et de tissus humains, cet acte chirurgical reste fortement entaché de tabous, dus en grande partie à la méconnaissance.

Meryem qui souffrait d'une insuffisance rénale depuis 6 ans vient enfin de voir le bout du tunnel. «Je souffrais d'une insuffisance rénale chronique en stade terminal. La seule solution était de me faire greffer un rein sain prélevé sur une personne en état de mort cérébrale. Cela a été difficile à supporter pour moi mais c'était la seule chance que j'avais de vivre, ajoute Meryem. Depuis, ma santé s'est améliorée, mais je continue à être hantée par l'idée que c'est quelqu'un d'autre qui vit en moi». Le Dr Mohammed Bennani, néphrologue à Fès, confirme la difficulté pour un patient de trouver un donneur du fait du problème socioreligieux qui entoure la mort.

«Il faut savoir que les organes ne peuvent être prélevés que sur des donneurs vivants apparentés (DVA), c'est-à-dire des parents, un conjoint ou des personnes en état de mort cérébrale qui auront fait don de leurs organes de leur vivant». Or, beaucoup de scientifiques considèrent que tant qu'un individu continue à respirer, on ne peut conclure à son décès. De plus, la mort encéphalique ne peut être perçue par les proches du malade comme une mort véritable et ne peut donner lieu à des manipulations chirurgicales jugées à tort peu conformes à la religion.

«Chez nous, plus qu'ailleurs, reprend le Dr Bennani, le mort est l'objet de croyances et de superstitions de toutes sortes qui confèrent un caractère d'inviolabilité au corps et rend difficile le prélèvement d'organes». Bien qu'elle ait été déclarée comme priorité par le ministère de la Santé publique et soutenue dans le cadre d'une collaboration avec l'Agence française de bio-médecine (AFB) et l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), la transplantation au Maroc souffre toujours d'un manque d'information et de communication auprès de l'opinion publique en dépit de sa prévalence. Selon Mohammed Benghanem Gharbi, président de la Société marocaine de néphrologie, 6.400 insuffisants rénaux sont pris en charge annuellement et bénéficient d'une dialyse. La greffe du rein est un réel substitut au traitement mais malheureusement ces opérations sont encore très limitées, au Maroc.

Seuls 200 patients sont porteurs d'un greffon rénal et il n'existe à ce jour que deux équipes de transplantation rénale, l'une à Rabat, l'autre à Casablanca. Mohammed Benghanem Gharbi insiste pour que soit généralisée cette pratique tout en cherchant plus de sources de financement afin de développer les compétences et mettre fin à des idées d'un autre âge.

Aspects socioculturels

Selon un sondage, particulièrement édifiant, réalisé par l'association Reins (Association de lutte contre les maladies rénales), 19% des personnes interrogées pensent que la transplantation n'est pas pratiquée au Maroc, 25% continuent à croire que la transplantation est interdite par la religion musulmane tandis que 74% n'avaient jamais abordé le sujet. En effet, les aspects socioculturels entourant la mort et l'intégrité du défunt sont prégnants au point que le personnel hospitalier se heurte systématiquement à un refus catégorique de prélèvement d'organes par les proches du défunt. La loi musulmane est souvent invoquée en guise de justification. Or, si en Islam, le corps est sacralisé, le prélèvement d'organes est un acte chirurgical qui a des finalités thérapeutiques. Et ce qui peut sauver une vie, dans la religion musulmane est au contraire fortement conseillé. Il est donc urgent que soit menée une véritable campagne de communication nationale avec le concours des médias, des instances religieuses et des professionnels de la santé pour sensibiliser l'opinion à ces enjeux vitaux de santé publique et faire tomber les dernières réticences socioreligieuses.

Par Samira EZZEL

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