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Albayane | Maroc | 09/05/2008
Les urgences sont à l’ordre du jour. Quoi de plus naturel, car lorsqu’on s’adresse aux services d’urgences, c’est pour être pris en charge immédiatement. C’est en tout cas la doctrine. Dans les faits, il en est autrement car la dimension particulière qu’a prise l’urgence aujourd’hui en fait un phénomène extrêmement complexe auquel il n’est pas toujours facile d’apporter la réponse satisfaisante. Le mot lui-même est devenu ambigu. C’est un fourre-tout : personnes âgées déshydratées, enfants présentant une fièvre, angine, douleurs abdominales, plaies, brûlures, sans domicile fixe, anxieux, ivrognes, fractures, femmes enceintes... La liste des motifs pour lesquels on s’adresse aux services des urgences est très longue, services qui sont fournis n’importe quand (le jour, la nuit, le dimanche, les jours fériés...). Il n’est pas excessif de définir ainsi l’urgence. Mais à côté de tous ces motifs qui justifient ou pas une consultation au niveau des services d’urgences, il y a les vraies urgences qui doivent en principe bénéficier d’une prise en charge adéquate.
C’est notamment le cas des catastrophes naturelles que notre pays a connues (inondations, séismes…) ou des douloureux événements de Casablanca, ou encore des accidents de la route avec leurs lots quotidiens de morts et de blessés graves… Autant de causes et de situations qui sont à la base d’une demande urgente en soins à laquelle normalement, et en toute bonne logique, le service d’accueil des urgences de l’hôpital le plus proche, c’est-à-dire celui dont dépend l’aire géographique où a eu lieu le drame, c’est ce service d’urgence qui doit être le lieu de convergence par excellence de tous les blessés. Bien équipé, doté en moyens humains suffisants et bien rodés à la tâche et en matériel de réanimation adéquats, ce service d’accueil des urgences devrait en principe pouvoir offrir les meilleures prestations et soins et surtout répondre à une situation urgente en cas de catastrophe. Ce rôle, ces missions et la réalisation de tous ces objectifs sont par essence la raison d’être de tout service d’accueil des urgences qui se respecte et qui a à cœur la santé des citoyens.
Malheureusement, dans la réalité, il en est autrement. La majorité des centres hospitaliers n’a pas de services d’urgences dignes de ce nom. Ces services ne sont pas véritablement équipés pour fournir des soins immédiats aux patients dont l’état nécessite une prise en charge rapide et surtout vitale. Il n’y a pas souvent de salle de déchoquage et encore moins de salles d’accueil des urgences vitales (SAUV), médicale et chirurgicale.
Le matériel de réanimation (respirateurs, défibrillateurs...) fait cruellement défaut. Il en est de même pour les appareils de monitorage pour la surveillance des patients graves (scope, oxymétrie...), sans parler du défaut de moyens de diagnostics comme l’ECG et l’échographie…
Ce qui serait souhaitable, c’est de pouvoir procéder à une mise à niveau des différents services d’urgences existant au niveau des différentes villes dans un premier temps.
Il ne s’agit nullement de tout entreprendre en même temps, mais d’initier une démarche cohérente et pragmatique, réaliste, et surtout réalisable là où le besoin se fait le plus ressentir. En d’autres termes, il s’agit de cibler les régions les plus exposées, de recenser les points noirs au niveau de chaque ville, de chaque préfecture. Par la suite il conviendra de procéder à une étude détaillée des différents moyens disponibles, des potentialités, des ressources, des voies de communications… Cette étude ne peut être entreprise que par des spécialistes, des experts en urgentologie et non pas par un bureaucrate qui n’a en réalité aucune connaissance des réalités sur le terrain.
Il est souhaitable de s’imprégner de l’expérience des services d’accueil des urgences qui sont aujourd’hui une référence en la matière. C’est notamment le cas au niveau du CHU Ibn Rochd de Casablanca, de l’hôpital Ibn Sina, de l’hôpital Cheikh Zaid à Rabat, ou existent des services d’accueil des urgences bien équipés. La situation peut s’améliorer avec plus de moyens, mais a-t-on idée de ce qui existe ailleurs. Et quand nous disons ailleurs, c’est juste à côté, par exemple à l’Hôpital de Mohammedia ou de Hay Mohammadi, de Sidi Bernoussi sans parler des autres villes où les services dits d’urgence se résument en de simples salles de soins. Il suffit de se rendre a Berrechid, à l’Hôpital de Sefrou, de Sidi Kacem, de Sidi Slimane, de Tétouan, de Boulmane, de Tiznit ou de Khénifra… Et que dire alors des régions où il y a un désert médical et où une simple piqûre de scorpion peut tuer un homme. Il faut reconnaître que des disparités considérables existent et que ces disparités régionales sont aggravées par une iniquité dans la répartition des ressources humaines, de la technologie, du médicament…
Ce constat souligne la nécessité d’une réorganisation profonde des urgences. On ne peut plus se borner aujourd’hui, en parlant d’urgence, à faire référence à tel ou tel hôpital. On devrait en principe pouvoir être pris en charge de la même manière où que l’on soit. Tous les Marocains devraient avoir les mêmes chances d’être bien traités indépendamment de leur lieu de résidence ou de leurs moyens financiers…
Les responsables au niveau du département de la Santé devraient permettre à tous les citoyens, là où ils se trouvent, de pouvoir accéder à des structures d’accueil dignes de ce nom, des urgences capables d’assumer pleinement leur mission.
C’est pourquoi une mise à niveau des services d’urgence est aujourd’hui une nécessité, voire même, une priorité pour le ministère de la Santé surtout que la spécialité (médecine d’urgence) est aujourd’hui reconnue en tant que telle au Maroc.
Abdelaziz Ouardighi
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