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Le matin | Maroc | 19/11/2007
C'est dans le but d'encourager cette «science» qu'une Journée scientifique nationale a été organisée par la Société marocaine de pharmacovigilance à Rabat, vendredi dernier, pour débattre de l'usage et le mésusage des médicaments. Une rencontre qui a regroupé des professionnels de la santé et du médicament de tous les bords. Ces derniers sont venus de différentes régions du Royaume pour discuter de plusieurs thèmes interagissant avec la pharmacovigilance au Maroc tels que la sécurité du patient, les effets indésirables et l'usage rationnel du médicament, la contrefaçon et les circuits informels du médicament.
Par ailleurs, les participants ont débattu du cadre légal de
la pharmacovigilance au Maroc. Un cadre, qui nécessite une accélération
de mise en place afin que le système de pharmacovigilance marocain atteigne
sa vitesse de croisière.
«Dans cette perspective, il est nécessaire d'élaborer un
décret ministériel visant à organiser le système
national de pharmacovigilance en rendant obligatoire la notification des effets
indésirables relatifs à l'utilisation du médicament que
ce soit par les professionnels de la santé, médecins, pharmaciens,
chirurgiens dentistes, infirmiers et sages-femmes ou par les fabricants et les
acteurs de l'industrie pharmaceutique.
Ce décret aura aussi pour objectif de définir le rôle du Centre national de pharmacovigilance», a annoncé Yasmina Badou, ministre de la Santé lors de l'ouverture de cette journée.
Cette rencontre s'est assignée également pour objectif d'encourager les travaux de la Société marocaine de pharmacovigilance. «Le choix de ce thème n'est pas le fruit du hasard. Cette journée nationale délivre un message qui lui paraît essentiel en matière de santé publique : la sécurité du patient doit constituer une priorité de tous les acteurs de santé. La pharmacovigilance en est justement le pivot principal.
Elle doit donc évoluer dans un cadre législatif bien structuré et avant-gardiste définissant le rôle et les attributions de chaque acteur de santé à savoir les professionnels de santé, les industries pharmaceutiques, les autorités sanitaires, la direction de la pharmacie et les experts dans le domaine», déclare Rachida Soulaymani-Bencheikh, directeur du Centre antipoison et de pharmacovigilance du Maroc. En effet, selon cette responsable, la sécurité du patient est fortement liée avec la pharmacovigilance. «Cette dernière est devenue le pivot autour duquel se développe le concept de l'utilisation rationnelle du médicament.
De ce fait, la pharmacologie est actuellement impliquée dans tous les
domaines pouvant contribuer à rationaliser l'utilisation des médicaments
et autres produits de santé et à limiter leur utilisation appropriée»,
a-t-elle déclaré.
En effet, le champ d'action de la pharmacovigilance est vaste. Elle a été
définie par l'OMS comme étant la «science et les activités
relatives à la détection, à l'évaluation, à
la compréhension et à la prévention des effets indésirables
ou de tout autre problème lié aux médicaments».
On comprend par cette définition que cette science s'intéresse à la surveillance des effets indésirables des médicaments après leur mise sur le marché mais aussi au cours des essais cliniques. Elle surveille aussi ces effets dans les conditions normales d'utilisation mais aussi en cas d'intoxication, de toxicomanie, de pharmacodépendance, de sevrage, d'absence d'efficacité, d'erreur médicamenteuse, d'échec thérapeutique, de résistance, de contrefaçon, de mauvaise qualité du produit ou de mauvaise information. Concrètement, la pharmacovigilance est une composante essentielle de tout système de santé, elle est destinée à éviter le plus possible les préjudices liés à l'utilisation des médicaments.
Créé en 1989, le Centre marocain de pharmacovigilance est devenu, dès 1992, le premier organisme africain et arabe admis comme membre officiel du centre collaborateur International OMS de Pharmacovigilance. Mais malgré les efforts considérables déployés par le Maroc pour préserver la sécurité du patient, il reste que de nombreuses vies restent menacées par la circulation du médicament contrefait. Ce dernier ne répondant pas aux normes de conformité sur le plan du contenu ou d'une spécialité pharmaceutique peut avoir de graves répercussions sur la santé publique mais aussi sur l'économie. Le risque est d'autant plus grave quand on apprend l'existence d'un marché informel de médicaments contrefait en bonne et due forme à Oujda. Selon des experts appartenant au Centre de transfusion sanguine à Oujda, la région orientale, surtout la ville d'Oujda, connaît depuis la fin des années 80 le développement d'un véritable circuit informel et illégal de médicaments.
Selon les déclarations de ces professionnels, le souk que les Oujdis
ont baptisé «Souk El Fellah» à l'instar de ses homologues
en Algérie, propose pratiquement toutes les familles médicamenteuses
à savoir les psychotropes, les antibiotiques, les corticoïdes, les
antidiabétiques, les antiasthmatiques, les antiulcéreux, l'insuline
et d'autres présentées à l'étalage
sur les trottoirs. La population y a recours en raison de leurs prix très
bas et en absence de toutes les règles légales de dispensation
surtout pour les psychotropes.
Selon les mêmes experts, l'origine de ces médicaments reste inconnue
malgré le conditionnement algérien ou français parce que
les grandes «mafia» de la contrefaçon se déguisent
selon les sites où elles opèrent. Ainsi et malgré la mobilisation
de tous les professionnels de santé auprès des autorités
locales et du ministère de la Santé, le phénomène
ne fait que s'amplifier.
L'application de la nouvelle loi 17-04 reste donc la seule issue pour venir
à bout de ce commerce.
Ladite loi, rappelons-le, vise la pénalisation de l'exercice illégal
de la pharmacie.
Un trafic juteux
Le Maroc n'est évidemment pas le seul pays concerné par la contrefaçon ou le commerce illégal de médicaments. Un médicament sur dix dans le monde est vendu illégalement. Et d'après une étude de la Food and Drug (Administration américaine), les préparations contrefaites représenteraient plus de 10% du marché mondial, soit 32 milliards de dollars de bénéfices par an.
Selon la Fédération internationale des industries du médicament, ce trafic serait 25 fois plus rentable que le commerce de l'héroïne et 5 fois plus que celui des cigarettes. La contrefaçon est une entreprise très lucrative. Elle ne demande pas de logistique importante. Pas besoin de grands établissements. Souvent, il suffit d'un simple entrepôt désaffecté ou d'une arrière-boutique pour se lancer dans la fabrication de ces copies.
Et d'après l'OMS, des contrefacteurs ont même été découverts en plein travail, à l'ombre d'un arbre en Afrique.
Carte de visite
La Société marocaine de pharmacovigilance (SMPV) a été créée le 10 novembre 2003 en fusionnant les principaux acteurs de la clinique, de la pharmacovigilance et des partenaires industriels dont le métier et la passion sont organisés autour du médicament.
Son objectif principal est la promotion de l'usage rationnel et de la sécurité d'emploi des médicaments et des autres produits de santé par la formation, la sensibilisation des professionnels de santé, l'information et par l'éducation de la population aux conséquences de l'usage irrationnel des médicaments. Depuis sa création, la SMPV a pu réaliser plusieurs activités dont : la participation à l'enseignement en collaboration avec la Société marocaine de toxicologie clinique et analytique dans le diplôme universitaire de toxicologie et pharmacovigilance ; l'amélioration du circuit de notification des effets indésirables des médicaments et des autres produits de santé ; et la connaissance de l'attitude et la perception du médecin prescripteur vis-à-vis de la pharmacovigilance par la réalisation d'une enquête auprès des professionnels de santé.
Par Yousra Amrani
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