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Revue de presse

Pas moins de 1,5 million de personnes atteintes de maladies rares au Maroc

Le matin | Maroc | 27/02/2022

Le monde entier célèbre ce lundi 28 février la Journée mondiale des maladies rares. Pas moins de 1,5 million de personnes en souffriraient au Maroc où il faut couramment 2 à 10 ans pour qu'un diagnostic soit établi et les traitements administrés, selon Dr Moussayer Khadija, présidente de l'Alliance des maladies rares.

Hémophilie, mucoviscidose, maladie de Charcot, maladie des os de verre, myopathie de Duchenne, progéria… la liste des maladies rares est très longue. Plus 8.000 pathologies ont déjà été recensées, mais le chiffre ne cesse d’augmenter, car de nouvelles maladies sont découvertes constamment. La Journée mondiale des maladies rares, célébrée ce lundi 28 février, est l’occasion de rappeler le quotidien difficile des patients souffrant de ces pathologies. Ces personnes doivent non seulement se battre pour établir le diagnostic de leur maladie, mais voient ensuite leur vie complètement chamboulée.

« Les maladies rares touchent 5% de la population mondiale et environ 1,5 million de Marocains. Cette catégorie d’affections est à l’origine d’innombrables difficultés pour les patients et leur famille. Cela commence déjà par un long parcours pour obtenir un diagnostic exact. Ce dernier est, en effet, assez difficile du fait du grand nombre de ces maladies rares et de leur présentation clinique souvent déroutante avec des atteintes fréquentes de plusieurs organes. Or aucun médecin ne peut maîtriser cet ensemble de cas si différents », explique Dr Moussayer Khadija, présidente de l'Alliance des maladies rares au Maroc (AMRM). Et d’ajouter que « la prise en charge des patients est également chaotique au Maroc, du fait justement de l’absence de centres de référence et de compétence pour ces pathologies ainsi que de dépistage néonatal systématique pour tous les nouveau-nés. L’absence de couverture médicale universelle et la non-disponibilité de certains médicaments compliquent aussi l’obtention de soins réellement efficaces ».

Il est à noter que les maladies sont souvent chroniques, évolutives et, en général, graves. Leur expression est extrêmement diverse : neuromusculaire, métabolique, immune, cancéreuse. Entravant l’autonomie, elles empêchent, par exemple, de bouger dans le cas des myopathies, voir pour les rétinites, respirer pour la mucoviscidose, résister aux infections pour les déficits immunitaires, et occasionnent des fractures à répétition en cas de maladie des os de verre…

Entretien avec la présidente de l'Alliance des maladies rares au Maroc

Khadija Moussayer : « Les maladies rares représentent pour le patient et sa famille un véritable parcours du combattant au Maroc »

Combien de Marocains sont-ils concernés par les maladies rares ? Et quelles sont les maladies les plus fréquentes au Maroc ?

Il n'y a aucune statistique vraiment exhaustive et précise concernant les maladies rares au Maroc : elles toucheraient au moins 1,5 million de personnes, mais il est possible que ce nombre soit encore plus élevé à cause des mariages consanguins (entre cousins) encore fréquents qui aggravent la possibilité de transmettre aux enfants ces pathologies qui sont à 80% d’origine génétique. Parmi les maladies rares les plus fréquentes, on peut citer beaucoup des maladies auto-immunes, comme la sclérodermie, c'est-à-dire des pathologies où le système immunitaire se dérègle et attaque notre organisme au lieu de le défendre.

Qu'en est-il de la prise en charge des patients marocains ?

La prise en charge est encore trop souvent déficiente faute d’un diagnostic exact effectué rapidement. Souvent laissées de côté en raison du faible nombre de patients concernés, les maladies rares représentent pour le patient et sa famille un véritable parcours du combattant au Maroc qui fait de nombreuses consultations chez plusieurs médecins. Il faut couramment de 2 à 10 ans pour qu'un diagnostic soit établi et les traitements administrés. Bien plus, un grand nombre de patients, jamais diagnostiqués sont soignés seulement sur la base de l'expression de leurs symptômes. Cette errance diagnostique est due notamment à l’absence d’un dossier médical unique et d’un médecin référent qui centralise les informations et coordonne les soins comme cela se fait en Europe. En effet, avoir un médecin référent permettrait d’avoir un suivi médical coordonné par un professionnel qui connaît tout du malade. Cela permettrait d'être mieux orienté pour identifier exactement la maladie et mettre en œuvre des soins adaptés.

Est-ce que notre pays dispose des solutions thérapeutiques capables de soigner les personnes souffrant de maladies rares ?

La recherche médicale a beaucoup progressé ces trente dernières années dans la connaissance des mécanismes à l’origine de nombreuses maladies rares. Actuellement, les médecins ont à leur disposition des centaines de traitements efficaces. Des tests de diagnostic, notamment en matière génétique et biologique, ainsi que de nouveaux traitements complexes et indispensables existent. Ces moyens sont toutefois limités et difficiles à obtenir au Maroc, car parfois coûteux (médicaments « orphelins », greffe de moelle osseuse…) et pas toujours bien connus, alors que leur bénéfice en terme financier ne se mesure que sur le long terme : un test adéquat sera toujours moins cher que des traitements inadaptés à vie ou le nomadisme médical auquel se livrent des patients désorientés !

Est-ce que le Maroc a mis en place une stratégie pour lutter contre les maladies rares ?

Des progrès indéniables ont été accomplis ces dernières années, en particulier dans les CHU, et les pouvoirs publics sont sensibilisés actuellement à une meilleure prise en charge des maladies rares. Il faut, cependant, aller plus loin et l’Alliance des maladies rares au Maroc préconise que cette problématique devienne une priorité de santé publique au Maroc s’inscrivant, à l’exemple de pays européens, dans un plan national pour les maladies rares, formulant les objectifs et les mesures à prendre comme le développement de centres de référence nationaux pour l’expertise et de centres de compétence régionaux pour les soins en nombre suffisant dans l'objectif d'assurer la couverture globale du territoire. Il faudra également œuvrer pour une meilleure accessibilité à certains médicaments indispensables et étendre le dépistage néonatal de certaines de ces maladies qui permettrait une prise en charge immédiate, sans oublier la formation accentuée des professionnels de santé à l’univers des maladies rares.

Hajjar El Haïti

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