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Le matin | Maroc | 01/12/2021
Nouveau variant Omicron, vaccination, mesures de précaution, nouvelle vague… le professeur d’épidémiologie et spécialiste des maladies infectieuses, Jaâfar Haïkal, apporte des éclairages sur la situation épidémiologique actuelle.
Interrogé premièrement sur l’émergence du nouveau variant et ses répercussions sur la situation sanitaire, l’épidémiologiste et spécialiste des maladies infectieuses, Jaâfar Haïkal a déclaré que « l’excès n’est pas une bonne chose dans toute action et politique publique. Aujourd’hui, nous avons plus de questionnements que de certitudes. Nous savons que ce nouveau variant va circuler probablement beaucoup plus vite, nous connaissons de manière précise le nombre de mutations dans ce variant, mais ce que nous ne savons pas, c’est le niveau de transmissibilité et de gravité, l’impact sur la létalité et s’il y a un échappement immunitaire qui pourrait menacer l’efficacité vaccinale ».
L’invité de L’Info en Face affirme, par ailleurs, que si Omicron a été détecté et séquencé en Afrique du Sud, il est possible qu’il provienne d’un pays voisin en Afrique australe. « Jusqu’à présent, nous n’avons pas eu de déclaration de décès, d’hospitalisation ou de gravité. Nous avons une inquiétude parce qu’il semble qu’en fonction de ses caractéristiques, ce mutant serait plus grave, mais cela reste un point d’interrogation », a-t-il indiqué.
S’agissant des mesures de précaution mises en place par certains pays, dont le Maroc, l’expert a rappelé que l’Organisation mondiale de la santé ne préconise pas la fermeture des frontières à ce stade et prône des réponses adaptées face à ce variant. « L’OMS n’a pas dit que c’est un haut risque de gravité, ce qu’elle a dit c’est un haut risque de transmissibilité et de contagiosité probablement », a-t-il précisé, notant que la décision prise par le Comité interministériel de suivi du Covid de la fermeture des frontières est «trop précautionneuse».
Pour le professeur Jaâfar Haïkal, la décision de fermeture des frontières ne va pas freiner l’arrivée éventuelle d’Omicron au Maroc, mais elle va probablement empêcher une grande entrée de ce nouveau variant. « Plusieurs pays ne savent pas si ce variant est entré sur leur territoire ou non et quand bien même s’il était présent, il n’a pas encore été montré, selon les cas répertoriés dans le monde, de plus grande gravité. Certes, la prudence doit être de mise, mais entre la prudence et l’excès des mesures de précaution, je pense qu’il faut avoir un juste milieu des choses », estime l’épidémiologiste.
Par ailleurs, l’expert explique qu’en comparant avec les autres variants Alpha et Delta, le nombre de mutations n’est pas plus important. « Les mutations importantes sur le virus au niveau de l’Alpha étaient de 23, alors que pour le Delta, il n’y en avait que 17. Si on prend la protéine Spike, qui est l’enjeu majeur, là où les vaccins vont agir, il y a effectivement beaucoup de mutations sur Omicron, mais il y avait moins de mutations sur le Delta que l’Alpha. Pour le récepteur de fixation RBD, il y en a une sur l’Alpha, deux sur le Delta et 10 sur l’Omicron. Donc, c’est vrai qu’il y a plus de mutations, mais peut-être que celles-ci ne concernent que la transmissibilité et non pas autre chose », a-t-il souligné, ajoutant que les variants ne peuvent, dans la majorité des situations, pas être plus agressifs, car il y a un apprentissage dans la circulation des populations qui peut entraîner un ralentissement de la gravité.
« Quand on analyse la létalité attribuée au virus, par rapport à son variant Delta, celle-ci est inférieure avec le Delta, en comparaison avec les variants précédents. Il y a, bien sûr, plusieurs facteurs qui entrent en jeu, comme le traitement, la meilleure connaissance de la maladie et la vaccination, mais globalement les nouveaux variants qui sont apparus après la souche classique ont enregistré moins de décès et de gravité en réanimation », a-t-il assuré. Donc, la crainte aujourd’hui est que cette souche puisse toucher les populations vulnérables et augmenterait le risque des décès et des cas graves.
Toutefois, l’invité de L’Info en Face note que la majorité de la population vulnérable, au Maroc notamment, a été vaccinée. « Il faut, au moins, gagner en termes de vaccination pour les trois doses, même s’il y a la possibilité qu’on s’aperçoive, dans les prochaines semaines, que les vaccins actuels n’ont aucune efficacité sur l’Omicron. Car, si vous me dites que les vaccins actuels ne protègent que 30% face au nouveau variant, ça vaut la peine de protéger les gens, c’est mieux que rien », a-t-il assuré. Et d’ajouter que les vaccins à ARN messager comme Pfizer et Moderna ont une capacité plus rapide à ajuster le mécanisme d’action pour les nouveaux variants, en comparaison avec les autres types de vaccins.
Par rapport à la vaccination d’autres catégories, notamment les 5-11 ans, l’épidémiologiste considère qu’il n’y pas assez de données scientifiques pour trancher la question. « Au vu des données scientifiques disponibles actuellement, je ne suis pas favorable à la vaccination de cette tranche. S’il y avait suffisamment de données, peut-être que je serai pour cette décision si ce variant est plus dangereux. Je ne veux que personne ne soit porteur de ce virus, mais ma crainte est moins importante quand il s’agit d’une personne en bonne santé qu’elle ne l’est en ce qui concerne une personne vulnérable. À mon avis, il faut prioriser la vaccination des personnes vulnérables, qui sont les plus exposées aux maladies graves et aux hospitalisations », a-t-il affirmé.
Pr Jaâfar Haïkal fait observer, dans ce sens, que le Maroc a connu deux vagues et a bien géré la situation. « La première vague a enregistré le pic en novembre 2020 et la deuxième en août 2021. Un nouveau variant peut entraîner une nouvelle dynamique épidémiologique, créant une nouvelle vague et un nouveau pic. Si l’Omicron s’installe et détrône le Delta, on peut s’attendre à un pic à fin décembre ou début janvier et si on démontre qu’il est plus grave et plus contagieux et que nous n’agissons pas vite, il est possible qu’on ait une troisième vague mais cela ne veut pas forcément dire plus de létalité», a-t-il noté.
Pour le spécialiste des maladies infectieuses, toutes les mesures de prévention comme le dépistage, les gestes barrières et le traitement gardent leurs rôles, si les vaccins s’avèrent moins efficaces face à ce variant. « Il faut que la première phase de la Covid-19 nous serve de leçon pour nous aider à mieux préparer notre système de santé afin qu’il soit résilient pour prendre en charge les gens dépistés et les traiter, mais en même temps, cela n’empêche pas de maintenir les mesures de prévention primaires », a-t-il conclu.
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