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Revue de presse

Maladies rares : la société civile appelle à reprendre les efforts interrompus

L'Opinion | Maroc | 02/03/2021

En célébration de la Journée mondiale des maladies rares, plusieurs spécialistes intervenant lors d’un webinaire, organisé le samedi 27 février, ont échangé sur la situation de ces pathologies au Maroc

Les maladies rares ont été au cœur d’un webinaire maghrébin organisé, le samedi 27 février, par l’Alliance des Maladies Rares au Maroc (AMRM) en partenariat avec les laboratoires Roche, Jansen et Laprophan. Cette rencontre vient marquer la célébration de la Journée Internationale des Maladies Rares (Rare Disease Day) organisée le dernier jour du mois de février de chaque année, dans près de 90 pays. Ce webinaire avait pour objectif de sensibiliser le corps médical et d’attirer l’attention du grand public et des décideurs sur ces maladies et sur les handicaps qu’elles peuvent engendrer. Ainsi, pendant plusieurs heures, divers intervenants ont échangé sur ces pathologies particulières ainsi que sur les derniers moyens de les dépister et de les traiter. Une maladie est dite rare quand elle touche moins d’une personne sur 2000. Anciennement connues sous l’appellation de « maladies orphelines », les maladies rares constituent un réel défi à cause de la difficulté de leur diagnostic et prise en charge.

Des maladies « orphelines »

Bien que chacune de ces maladies ne concerne qu’un nombre relativement faible de personnes, leur grande variété (plus de 8 000 maladies rares sont déjà recensées et chaque année entre 200 à 300 maladies rares sont nouvellement décrites) fait que le nombre total de personnes atteintes dépasse souvent le nombre de malades du cancer ou du diabète : 5% de la population mondiale, c’est-à-dire qu’une personne sur 20 est concernée. Les maladies rares se caractérisent par un large spectre de problèmes et de symptômes, qui varient non seulement d’une maladie à l’autre, mais d’un patient à un autre, atteint de la même maladie.

Derrière des symptômes relativement communs peuvent se cacher des maladies rares, ce qui conduit à poser de mauvais diagnostics. La plupart de ces maladies sont génétiques et sont présentes pendant toute la vie de la personne qui en est atteinte, même si les symptômes n’apparaissent pas immédiatement.

Etat des lieux au Maroc

Au Maroc, plus de 1,5 million de personnes souffrent d’une maladie rare. « Il est possible que ce nombre soit encore plus élevé à cause des mariages consanguins encore fréquents qui aggravent la possibilité de transmettre aux enfants ces pathologies qui sont à 80 % d’origine génétique », souligne Dr Khadija Moussayer, spécialiste en Médecine interne et en gériatrie et présidente de l’Alliance des Maladies Rares au Maroc (AMRM).

« Au Maroc comme ailleurs, les maladies rares sont extrêmement diverses: neuromusculaires, métaboliques, infectieuses, immunes, cancéreuses. Elles empêchent ainsi de voir (rétinites), respirer (mucoviscidose), résister aux infections (déficits immunitaires), coaguler normalement le sang (hémophilie), grandir et développer une puberté normale (syndrome de Turner), d’autres provoquent un vieillissement accéléré (progéria), des fractures à répétition (maladie des os de verre) ou encore peuvent causer une transformation des muscles en os », énumère la présidente de l’AMRM.

Des efforts restés sans suite

En 2019, le ministère de la Santé avait annoncé la mise en œuvre imminente d’un véritable programme dédié aux maladies rares. Intégré dans le cadre du Plan Santé 2025, ce programme avait pour ambition de créer des pôles d’excellence spécialisés dans les maladies rares et inflammatoires. Un workshop organisé le 2 juillet 2019 avait même pour objectif d’identifier les centres de référence pour les maladies rares au niveau des Centres Hospitaliers Universitaires (Rabat, Fès, Casablanca, Marrakech et Oujda), d’arrêter les missions de ces pôles et de définir une stratégie de prise en charge thérapeutique, psychologique et d’accompagnement social. « Nous avions été invités par l’ancien ministre de la Santé. Nous avions tenu plusieurs réunions qui ont impliqué des médecins de CHU et des acteurs de la société civile. Il y a ensuite eu un remaniement ministériel et les choses ont depuis stagné », déplore Dr Khadija Moussayer qui espère que le sujet ne tardera pas à être « remis à l’ordre du jour » dans l’agenda des autorités concernées.

Oussama ABAOUSS

3 questions à Dr Khadija Moussayer, présidente de l’AMRM

Khadija Moussayer
« Le dépistage néonatal systématique est une priorité absolue »

Présidente de l’Alliance des Maladies Rares au Maroc (AMRM), Dr Khadija Moussayer a répondu à nos questions sur les moyens d’améliorer la prise en charge des maladies rares au Maroc.

Comment le Maroc peut-il se doter de centres de référence dédiés aux maladies rares ?

En principe, il est possible de commencer par un seul centre de référence doté d’un véritable plan d’action, notamment pour former les médecins et le personnel (diététiciens, kinésithérapeutes, infirmiers spécialisés) concernant la prise en charge des maladies rares. Cette expérience peut ensuite être dupliquée dans une autre ville avec en complément des centres de compétences pour les soins de proximité.

Quelles sont, selon vous, les actions urgentes à réaliser dans le domaine des maladies rares au Maroc ?

En prenant en considération le manque de moyens humains et financiers, je pense qu’il y a au moins deux leviers qui peuvent améliorer la prise en charge des maladies rares au Maroc. Il y a d’abord le dépistage néonatal systématique qui est une priorité absolue, car il permet d’éviter le handicap définitif et irréversible avec peu de moyens (exemple de l’hypothyroïdie). Il y a également la sensibilisation concernant les mariages consanguins qui augmentent les risques de maladies rares. Je pense qu’il est également important d’encourager les malades à créer des associations pour faire du plaidoyer et servir d’intermédiaire avec les pouvoirs publics.

Le dépistage néonatal systématique est-il actuellement pratiqué dans le Royaume ?

Il y a eu des essais pilotes dans les maternités de quelques villes, mais ça ne concerne que l’hypothyroïdie, et, malheureusement, ça n’a pas été généralisé. Ces dépistages peuvent également être effectués dans le privé, mais ce n’est pas systématique puisque ça reste à la discrétion du médecin ou des parents. À noter que le dépistage néonatal ne concerne pas toutes les maladies rares. En France, ce dépistage permet de diagnostiquer 7 maladies de ce type alors qu’aux USA, ce dépistage permet d’en détecter une cinquantaine.
Recueillis par O. A.

Société civile : Une alliance pour lutter contre les maladies rares au Maroc

L’Alliance des Maladie Rares au Maroc (AMRM) a été créée en février 2017 à l’initiative de l’Association Marocaine des Maladies Auto-Immunes et Systémiques (AMMAIS) et grâce au regroupement de neuf autres associations dédiées à diverses maladies rares. Elle a pour principale mission de faire connaître ces maladies auprès du grand public, des pouvoirs publics et des professionnels de santé, d’améliorer la qualité et l’espérance de vie des personnes atteintes de maladies rares et d’aider les associations de malades.

L’Alliance estime nécessaire de « promouvoir les maladies rares au rang de priorité de santé publique s’inscrivant dans un plan national pour les maladies rares. Celui-ci formulerait les objectifs et les mesures à prendre, notamment dans les domaines de la formation et de l’orientation des patients avec le développement de centres de référence nationaux pour l’expertise et de centres de compétences locaux pour les soins ». L’Alliance a mené depuis sa création plusieurs campagnes médiatiques sur la problématique des maladies rares au Maroc. Elle a soutenu les actions des associations membres et a également participé à la création d’autres associations, notamment l’Association de personnes atteintes de Rachitisme Vitamino-Résistant et l’Association des malades d’angiœdèmes. L’Alliance a par ailleurs organisé des journées scientifiques pour célébrer la Journée internationale des maladies rares avec des thématiques transversales fondatrices de la problématique des maladies rares.

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