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Albayane | Maroc | 15/04/2020
Le Dr Moussayer Khadija est spécialiste en médecine interne et en Gériatrie. Présidente de l’Alliance Maladies Rares (Maroc), présidente de l’association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS) et vice-président du Groupe de l’Auto-Immunité Marocain (GEAIM), elle répond aux questions d’Al Bayane, sans détour.
Al Bayane : Quelle est la durée de vie d’un virus en général et du Coronavirus en particulier ?
Dr Moussayer Khadija : Un aspect qui n’est pas encore bien clair est la durée exacte de survie de la charge virale susceptible de contaminer une personne, sachant qu’une simple existence de débris du virus ne suffit pas à ce qu’il soit encore dangereux.
Une seule toux peut produire jusqu’à 3 000 gouttelettes, les éléments les plus dangereux qui risquent de s’étaler sur les vêtements et sur les surfaces qui les entourent, mais de plus petites particules peuvent rester aussi dans l’air.
Certaines études ont montré que le virus survit sur du métal, du verre, du plastique ou du papier jusqu’à plusieurs jours, à moins d’être correctement désinfectés.
En tout état de cause devant notre manque de connaissance exacte sur ce risque, nous devons être rigoureux dans notre lutte contre le coronavirus. Nous devons nettoyer et désinfecter toute surface souillée par des sécrétions respiratoires émises par la toux ou les éternuements ou l’air expiré ; les poignées de porte, téléphones portables et meubles souillés. En termes de produits, nous devons utiliser l’eau de javel diluée à 1/6e (1 volume d’eau de javel + 5 volumes d’eau courante) ou tout autre produit désinfectant virucide.
La longévité du virus dépend-elle du climat ?
Là aussi, il est difficile d’y répondre. Certains virus disparaissent à l’arrivée de l’été, comme la grippe ou le rhume. Mais le coronavirus se propage malheureusement très bien actuellement dans les pays chauds et secs, comme au Moyen-Orient.
Comment se prémunir du Covid-19 ?
Face à l’épidémie, il ne faut pas céder à la peur mais bien suivre les méthodes de protection individuelle pour soi et pour les autres, c’est-à-dire en particulier rationaliser nos mouvements pour limiter au maximum les sorties et les contacts avec les autres, se laver les mains à l’eau et au savon (efficace contre le virus) fréquemment et correctement. C’est le geste majeur de prévention. Une opération à effectuer avant et immédiatement après toute sortie à l’extérieur, tout transfert des documents et d’objets à la main entre 2 personnes, après avoir toussé ou éternué, avant de préparer la nourriture, avant de manger et après être allé aux toilettes. Si nous avons des difficultés à avoir une source d’eau, nous pouvons utiliser une solution hydro alcoolique comme alternative au lavage à l’eau et au savon pour les désinfecter. Bien se les laver, c’est nous frotter : les paumes des mains l’une contre l’autre, les doigts ensemble puis les doigts d’avant en arrière et enfin les poignets de manière circulaire avec la paume de l’autre main, suspendre immédiatement, dans un endroit bien ventilé et le maximum à l’écart de vos proches, les vêtements de dessus utilisés lors de chaque sortie ayant pu donner lieu à des contacts ou des manipulations à risque. Nettoyez-les éventuellement ensuite (…).
Pour les personnes âgées, comment garantir leur santé ?
C’est la problématique majeure de cette épidémie, les personnes âgées (PA), en particulier après 70 ans, constituent la population la plus vulnérable face au coronavirus. Leur protection est donc une priorité absolue et elle comporte un double défi : respecter absolument le confinement et maintenir au maximum les capacités musculaires par l’exercice physique. Il faut ainsi combattre l’inactivité physique, la sédentarité et le stress qui peuvent conduire à un désengagement de la PA dans ses besoins quotidiens et l’entrainer dans une spirale délétère : sous-alimentation, diminution de la masse musculaire et des capacités cardio-respiratoires, aggravation des pathologies existantes, dépression, perte d’autonomie… Avoir une bonne hygiène de vie et entretenir sa santé au cours de ce confinement est primordial non seulement pour affronter la contagion et éventuellement la maladie mais aussi pour éviter un affaiblissement durable et périlleux de la santé générale.
Une alimentation suffisante
Le seuil de la perception de la faim et de la soif s’émoussant avec l’âge, les PA ont tendance à diminuer leurs apports en aliments et en boissons, alors que leurs besoins énergétiques sont peu inférieurs à ceux de l’adulte jeune : 2000 kilocalories par jour pour l’homme et 1800 kcal/j pour la femme contre respectivement 2800 et 2200 à 30 ans.
Pour éviter la fonte musculaire, l’apport nutritionnel en protéines animales surtout (viandes, poissons) et aussi végétales (lentilles, pois chiches, pois cassés, dattes et figues séchées, céréales…), doit même être supérieur à celui de l’adulte jeune et représenter 12 à 15 % des apports énergétiques journaliers. Les besoins en eau de boisson sont aussi toujours plus élevés chez la PA que l’adulte jeune (1,7 l/j contre 1,5l/j) à cause d’une élimination urinaire plus forte.
Une activité physique dynamique
Une pratique physique, même dans un espace restreint, est indispensable car la force des muscles des PA baisse rapidement en l’absence de mobilité. Il s’agit notamment de réaliser plusieurs fois par jour de petits exercices de gymnastique mobilisant en particulier les bras et les jambes (30 mn par jour si possible) et de se lever toutes les heures pour marcher.
Une gestion de l’angoisse
La situation actuelle anxiogène provoque évidemment un sentiment d’angoisse chez beaucoup de PA, avec des risques d’hypertension, de hausse de la glycémie, de dépression. Garder des liens étroits avec l’entourage, même à distance est primordial, pour faire baisser ce stress. La PA doit aussi se mobiliser pour entretenir son moral par tous les moyens possibles de distraction.
Une poursuite des traitements en cours
Les personnes âgées doivent continuer leurs traitements existants et même ceux qui diminuent les capacités du système immunitaire pour ne pas déstabiliser la maladie sous jacente. Il faut demander conseil au médecin traitant pour leurs adaptations éventuelles. L’automédication ou la surconsommation est par contre à prohiber en cette période !
Quelles sont vos précisions en tant que médecin sur la fin de la pandémie ?
Le Maroc connaît malheureusement maintenant la même évolution que la plupart des autres pays. Nous allons vaincre cette épidémie mais connaître certainement des moments très compliqués. La difficulté principale est de parvenir à réguler l’afflux de patients dans les hôpitaux. On peut espérer que le confinement permettra un peu d’étaler dans le temps les cas graves. Prévoir à quel moment nous sortirons complètement de cette pandémie est impossible à estimer pour le moment.
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