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Revue de presse

Les médecins déclarent la guerre aux pharmaciens

L'économiste | Maroc | 02/04/2019

  • Au cœur du conflit, le droit de substitution ;
  • Les médecins estiment que la prescription doit être leur monopole ;
  • Une pratique courante malgré l’absence de disposition législative.

La polémique entre les médecins et les pharmaciens autour du droit de substitution repart de plus belle. Le droit de substitution consiste en la possibilité pour les pharmaciens de vendre à leurs patients des médicaments autres que ceux figurant sur l’ordonnance à condition qu’ils offrent la même efficacité et les mêmes vertus thérapeutiques.

Plusieurs raisons peuvent être à l’origine du changement de prescription. Il peut s’agir d’un cas de rupture de stock ou de l’incapacité à acheter certains médicaments. Il arrive que ces patients renoncent au médicament parce qu’il est trop cher ou demandent une référence à leur portée. Cet argument fait sortir les médecins de leurs gonds.

Pour eux, les options sont mauvaises. « Il se peut que ce médicament soit le plus important de toute la prescription. Quant à son remplacement, je n’y vois aucune objection à condition qu’il y ait une concertation entre le pharmacien et le médecin pour trouver la meilleure alternative de soins », précise Jaafar Heikel, professeur de médecine et économiste de la santé.

Lorsqu’un pharmacien propose à un patient un autre médicament que celui prescrit par son médecin, celui-ci voit cela comme une « usurpation de fonction ».

Les médecins y sont formellement opposés. Le Syndicat national des médecins du secteur libéral vient réitérer sa position sur cette question. Tout en se félicitant de la publication du décret sur la bioéquivalence, il dénonce le fait que « certains pharmaciens en profitent pour ressortir leurs revendications au sujet d’un prétendu droit de substitution comme solution à la rupture de stock de certains médicaments ».

L’attribution de cette « dérogation » est une revendication qui remonte à plusieurs années. Elle occupe le devant de l’actualité car un important décret sur le dispositif de la bioéquivalence est entré en vigueur. L’occasion donc pour les pharmaciens de se positionner.

Ce droit avait été promis par El Haussine Louardi, ancien ministre de la Santé, lors des tractations pour l’élaboration du décret sur la fixation des prix des médicaments. Les pharmaciens avaient été convaincus d’accepter la baisse du prix de milliers de produits, moyennant la hausse de leur marge et l’augmentation des médicaments de confort dont les prix sont trop bas.

A l’époque, il y avait un malentendu entre le ministre et les organisations professionnelles représentant les pharmaciens. En effet, au lieu de relever ces prix, Louardi avait promis d’activer le droit de substitution comme mesure compensatoire.

Mais comme les promesses n’engagent que ceux qui y croient, plus de cinq ans après la publication du décret sur les prix des médicaments, la mesure n’a toujours pas été mise en œuvre. Et aucun signal à l’horizon n’indique que cette option est à l’ordre du jour.

Sur le droit de substitution, le professeur Heikel est le seul, du moins pour le moment, à ouvrir une brèche pour que le pharmacien propose une alternative au patient. Ce qui suppose que les officinaux sont toujours présents dans leur pharmacie. « A la limite lorsqu’il y a une concertation avec le médecin traitant, il n’y a pas de problème à ce que le pharmacien propose une alternative au patient ».

Le médecin refuse de parler de droit de substitution et déclare que ce n’est pas à coup de communiqués que le problème sera résolu. « Il faut que les deux parties s’assoient à la même table pour débattre de la meilleure voie pour exercer ensemble la santé ».

Contactée par L’Economiste, la Fédération nationale des syndicats des pharmaciens est restée injoignable. Selon nos informations, les différentes organisations professionnelles des pharmaciens tiendront bientôt une réunion pour adopter une position commune.

Un point d’entrée vers la santé

Dans le système de santé, le pharmacien est la première personne à laquelle s’adressent les citoyens avant de consulter. L’objectif étant de se faire proposer des médicaments assez efficaces pour ne pas devoir aller chez le médecin. Pour les médecins cela est assimilé à l’exercice illégal de la médecine. « En principe, la prise de tension et l’examen de diabète sont des actes médicaux. Pourtant, ils sont souvent pratiqués par les pharmaciens. C’est un peu comme si un médecin se mettait à vendre des médicaments », précise un médecin.

Hassan EL ARIF

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