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Aujourd'hui Le Maroc | Maroc | 25/02/2018
Lors du 5ème forum Afrisanté, qui a pris fin le 22 février à Marrakech, Farba Lamine Sall a mis l’accent sur la gratuité dans santé. Celle-ci est censée être substituée, à son sens, par des subventions ciblant les personnes qui en ont réellement besoin. Un point de vue partagé par plusieurs participants à cet événement qui met le Sénégal à l’honneur.
ALM : Quelle évaluation faites-vous du système de la santé en Afrique ?
Dr Farba Lamine Sall : C’est une grande question ! En tout cas, il existe tellement de différences d’un pays à l’autre. Mais ce qui peut rester constant et permet de faire un jugement c’est l’importance des défis et du cahier des charges. Il y a tellement à faire. Ce ne sont pas que des problèmes de santé mais de développement. En réalité, nous sommes face à des problèmes de développement qui ont des retentissements dans plusieurs domaines, y compris celui de la santé. Comme vous l’avez vu dans les discussions lors du forum, on parlait des déterminants de la santé. Il est question d’arriver à améliorer les conditions de vie des populations, la gouvernance, les comportements et le niveau d’alphabétisation. Dans tout cela il n’y a pas le mot santé. Mais si nous faisons des progrès dans tous ces domaines, nous serons en train d’améliorer l’état de santé de nos populations. C’est donc un grand chantier sans fin.
Quelle serait la bonne démarche à entreprendre dans l’immédiat ?
Ce qu’il faut, c’est d’essayer de faire notre maximum en ayant toujours cette grande ambition de couverture sanitaire. Pour ma part, j’insiste sur ce point. Cette ambition consiste à faire en sorte de limiter autant que possible les maladies évitables par une action sur les déterminants en trouvant des réponses appropriées aux besoins de santé des populations tout en adoptant une démarche de vérité. Celle-ci consiste à être aux antipodes du discours de gratuité intégrale qui n’est soutenable par aucun pays. Il est vrai qu’il existe des gens qui ne peuvent pas payer et qu’il faut sélectionner rigoureusement et faire jouer la solidarité pour les prendre en charge. Il ne faut pas, au nom de l’équité, faire de l’iniquité, soit de faire bénéficier d’un service quelqu’un qui n’en a pas le droit. Je donne l’exemple de mon enfant qui a moins de 5 ans. Il n’a pas besoin de prise en charge puisque je la paie déjà. Tel est le défi de la santé en Afrique. Il s’agit de trouver la manière d’avancer vers la couverture universelle en ayant une maîtrise sur les maladies évitables par une action sur les déterminants, de développer une offre répondant aux problèmes de santé des populations et organiser celles-ci pour que la prise en charge soit en amont par tous les dispositifs d’assurance et de couverture des risques maladies.
Lors du forum, vous avez mis l’accent sur la gratuité qui n’est pas soutenable à votre sens. Quel serait alors le moyen adapté pour la remplacer ?
Il ne s’agit pas de la remplacer. La gratuité est un mot que je n’aime pas d’ailleurs. Je parle plutôt de subventions. Il n’est pas question de supprimer celles-ci mais de faire un effort de ciblage des populations qui, effectivement, ne peuvent pas payer. La protection sociale est essentielle. C’est le ciblage qui doit être assisté. C’est un travail de spécialiste. Les travailleurs sociaux savent bien le faire. Il faut encore une fois rompre avec ce tout gratuit. Cela n’existe nulle part.
Pourriez-vous nous donner idée du système de santé de votre pays ?
C’est la même chose qui se passe au Sénégal. Il y a aussi ces expériences de gratuité et il y a ces efforts à faire. Il faut corriger sans persister dans une voie qui mène tout droit au mur. Il s’agit de faire en sorte que les subventions aillent à ceux qui en ont réellement besoin. Cela peut être corrigé chemin faisant. Tous les pays sont dans des chantiers où il y a encore une grande marge pour parfaire les choses qu’il faut prendre comme tel. Cela ne se construit pas en un jour. Si on se trompe, on corrige, si on fait mieux quelque part, on le prend à notre compte et on l’intègre dans le pays.
Salima Guisser
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