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…j’ai ressenti le devoir de rédiger et d’insérer dans le numéro 8 de la revue « Le journal du Praticien » de l’année 1996, un hommage à notre Maitre, le Pr. Bachir Mentouri qui venait malheureusement de disparaitre après une longue maladie. J’ai quitté la CCA vingt ans auparavant, mais mes souvenirs étaient restés intacts. J’ai relu ce que j’avais écrit alors. Aujourd’hui, je n’aurais pas rajouté ni supprimé une ligne de ce qui me paraissait, à l’époque, la traduction fidèle et sincère de la trajectoire de cet »honnête homme » dans l’acceptation la plus noble du terme.
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Par le Pr. Mustapha Maaoui
« Adieu curé je t’aimais bien, Adieu curé je t’aimais bien, tu sais On n’était pas du même bord, On n’était pas du même chemin, Mais on cherchait le même port… » Jacques Brel
Je connais Bekada Hadj Benmhel depuis bientôt cinquante ans ! En fait je le connaissais indirectement, son environnement et lui-même, avant de le voir et de l’apprécier pour lui-même, dès le début, dans les années soixante.
Ayant une de mes sœurs et son mari dans l’enseignement à Annaba, j’entendais déjà parler avec beaucoup de respect de son frère ainé, cadre de l’éducation algérienne. Puis ce fut à la cité universitaire de Ben-Aknoun que l’on ma parlé de Mazouna, son lieu de naissance. Dans la bouche des frères Bourokba, Lakhdar, Mahieddine et El H’bib la description était forcément (mais à juste titre) empreinte d’enthousiasme envers cette région si ancrée dans le pays profond. Ensuite, il y eu comme « catalyseurs » les professeurs Ghalib Djilali et Messaoud Zitouni, ainsi que ses camarades de conférence d’internat, à l’image de Saïd Bouhelassa, Brahim Touchène, Azzouz Lebied et de quelques autres qui me pardonneront de ne pas tous les citer.
A première vue, rien de ce qu’était El hadj et rien de ce que je suis ne nous destinait à une amitié, basée sur un immense respect réciproque et qui a survolé le demi siècle sans anicroche.
El hadj était plutôt réservé, presque taciturne. J’étais enjoué, exubérant. Il donnait l’impression, en première analyse, d’un homme de la tradition. Certes, il était très attaché aux valeurs ancestrales et il était croyant : sa foi religieuse était solidement ancrée chez lui, mais je ne l’ai jamais vu l’exprimer et encore moins l’afficher. Il était d’une modernité surprenante et son esprit d’ouverture en étonnait plus d’un. L’homme était d’une rigueur et d’une franchise déconcertantes, droit dans ses bottes, déterminé sans être obstiné : il était capable de reconnaitre ses limites, voire ses torts, et alors il se ravisait sans complexe. Sa « transparence »ne lui faisait pas que des amis : il les affrontait toujours avec beaucoup de cran, jamais avec de la haine. Il était focalisé sur son travail et pour donner un exemple, un jour de 2001 où je l’interrogeais sur les circonstances qui lui ont miraculeusement sauvé la vie lors des inondations de Bab el oued, il me répondait en donnant des nouvelles sur le livre de séméiologie qu’il concoctait à l’époque.
Si je devais résumer sa vie, cela serait ainsi : il avait le feu sacré de son métier de chirurgien, en tant que praticien et enseignant. I l en avait fait un sacerdoce auquel il s’est voué corps et âme. S’il avait vécu derrière « le rideau de fer », il aurait été stakhanoviste. S’il avait été soldat, on aurait dit qu’il « est tombé au champs d’honneur ». S’il avait été baladin, on l’aurait comparé à Molière, mort, dit-on, sur les tréteaux. Cette dernière comparaison ne lui aurait certainement pas déplu, lui qui était féru de culture anglo-saxonne et qui savait donc que le bloc opératoire, « sa patrie », est désigné dans ces contrées sous le vocable de « theater ».
Bekada Hadj Benmhel nous a quitté à l’hôpital Lamine Debaghine, dans le service qu’il dirigeait de façon exemplaire avec une compétence et une rigueur enveloppées de discrétion depuis quinze ans, lui qui a été le transfuge de la CCA où il a longtemps côtoyé notre maitre le professeur Mentouri qui lui accordait toute sa confiance, conscient du rôle essentiel qu’y jouait El hadj. Pour une fois qu’il part en premier d’un hôpital, c’est pour rejoindre un monde qu’on dit meilleur.
Repose en paix, Bekada, mon cher ami
Bekada, après l’accolade qu’il vient de me faire, lors de ma thèse inaugurale, ne quitte pas encore l’amphithéâtre Leblanc et regarde, l’air goguenard, Mohamed Djennas dont c’était le tour (Juin 1974). Arrivant, hilare, Ali Bekkouche, (SNVI) que nous avons enterré il y a deux mois.
Journées de chirurgie : encadrant Bekada au centre, Salah Laoubi à sa droite et moi-même (années 80).
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