Le cancer du sein est une maladie sournoise qui touche principalement les femmes. Elle est la maladie la plus répandue chez la gent féminine. En Tunisie, on compte près de 3.000 nouveaux cas enregistrés par an, alors que dans le monde, on détecte plus de 2.000.000 de cas par année. Qu’est-ce qu’un cancer du sein ? Quelles sont ses formes et comment le traiter et le prévenir ? Quels sont les facteurs de risque ? Quels sont les traitements médicaux adaptés pour soigner un cancer du sein… Docteur Hatem Bouzaiene, professeur en chirurgie carcinologique à l’Institut Salah-Azaiez, répond à toutes nos questions et nous éclaire sur la maladie, ses causes et symptômes.

Pouvez-vous nous livrer quelques chiffres-clés sur le cancer du sein en Tunisie et dans le monde ?

Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent de la femme. Une femme sur 9 est atteinte d’un cancer du sein au cours de sa vie. On enregistre 2.089.000 de nouveaux cas par an dans le monde et près de 3.000 nouveaux cas par an en Tunisie. Cette incidence est en augmentation. L’âge moyen de l’affection est de 59 ans en Occident et de 49 ans en Tunisie.

Quels sont les symptômes du cancer du sein ?

L’asymétrie des seins, l’ombilication du mamelon (lorsque le mamelon est rétracté sur lui-même, la rétraction de la peau), l’ulcération, l’aspect de la peau d’orange ou l’apparition de nodules sous la peau sont les signes qui peuvent faire suspecter un cancer du sein. Une tuméfaction, un nodule ou une masse sont les signes les plus fréquents. Un épaississement cutané, un écoulement mamelonnaire, des adénopathies axillaires ou sus-claviculaires figurent aussi parmi les symptômes du cancer du sein. Les douleurs sont rarement un signe de cancer du sein.

Quels sont les facteurs de risque ?

99% des patients sont de sexe féminin et le risque d’avoir un cancer du sein augmente avec l’âge. Un cancer du sein détecté avant 20 ans est exceptionnel et rare. L’âge moyen de la maladie est de 49 ans en Tunisie. Les antécédents personnels de mastopathie (maladie du sein non cancéreuse, telle que la mastose kystique), les antécédents personnels du cancer de l’ovaire, de l’endomètre (muqueuse de l’utérus) et du colon sont des facteurs de risque.
La puberté précoce, la ménopause tardive, l’absence d’allaitement ou une première grossesse tardive après 35 ans constituent tous des facteurs de risque. Le traitement hormonal substitutif (THS), qui s’adresse aux femmes qui sont déjà ménopausées et qui présentent des troubles fonctionnels liés à la ménopause, serait, quant à lui, un facteur favorisant alors que la contraception œstrogeno-progestative (pilule combinée) augmente très faiblement le risque du cancer du sein. On note aussi les facteurs génétiques et héréditaires, les facteurs environnementaux, ainsi que l’alimentation riche en acides gras et la consommation d’alcool.

Quels sont les différents types du cancer du sein ?

Il existe différents types de cancer du sein. Le carcinome canalaire in situ est un cancer du sein situé au niveau des canaux galactophores du sein, le carcinome canalaire infiltrant (un cancer qui naît dans les canaux mammaires, traverse leurs parois et envahit le tissu mammaire voisin) le carcinome lobulaire infiltrant naît dans les lobules du sein, traverse ces lobules et envahit le tissu mammaire voisin). Il existe également d’autres types de cancer, à l’instar de la tumeur phyllode maligne et du lymphome malin.

Quels sont les principaux avantages d’un dépistage précoce et quel type de dépistage préconisez-vous ?

Le dépistage permet de diagnostiquer le cancer à un stade précoce et d’envisager des traitements plus simples, moins mutilants avec moins d’effets indésirables et moins coûteux. Le taux de survie peut atteindre les 90% et même 100% pour les carcinomes in situ qui se caractérisent par la prolifération des cellules cancéreuses à l’intérieur d’un canal galactophore sans que les cellules ne dépassent la paroi du canal et n’envahissent le reste du sein. Le dépistage clinique qui permet de chercher les lésions palpables et qui se base sur l’auto-palpation des seins, une fois par mois et l’examen systématique des seins par la sage-femme, le médecin généraliste et les spécialistes en gynécologie, une fois par an, le dépistage radiologique et la mammographie une fois tous les deux ans à partir de l’âge de 45 ans sont les moyens de dépistage à préconiser. En cas de prédisposition génétique, on préconise l’IRM annuelle à partir de 25 ans, associée à une surveillance des ovaires.

Quels sont les traitements médicaux du cancer du sein ?

La chirurgie, la radiothérapie, la chimiothérapie, l’hormonothérapie, la thérapie ciblée et l’immunothérapie qui est en cours de développement sont les traitements médicaux du cancer du sein.

Les hommes peuvent-ils être touchés par le cancer du sein ?

Oui… les hommes sont touchés par le cancer des seins dans 1 à 2% des cas.

Peut-on guérir définitivement d’un cancer du sein et y aura-t-il un risque de récidive ?

La guérison du cancer sein est possible dans la majorité des cas, notamment quand il est diagnostiqué à un stade précoce. Il y a un risque de récidive d’où la nécessité d’une surveillance à vie.

Quel est le taux de mortalité dû au cancer du sein et celui de guérison ?

Le pronostic du cancer du sein est favorable. Sa survie à 5 ans est d’environ 88% et de 78% à 10 ans. Elle est cependant différente selon le stade du cancer. Pour les stades précoces (dans 60% des cas), la survie est supérieure à 90%.

Comment prévenir un cancer du sein ?

Il est difficile de prévenir le cancer du sein, c’est pour ça que le dépistage est très important. Avoir des enfants avant l’âge de 30 ans, le contrôle du poids et la lutte contre le surpoids, la limitation de la consommation de graisses animales et de sucre, l’allaitement le plus longtemps possible, la limitation de la consommation d’alcool et de tabac, la pratique d’une activité sportive régulière et l’utilisation, avec précaution, de la pilule contraceptive et des traitements substitutifs de la ménopause sont les meilleurs moyens de prévention.

Les personnes traitées pour un cancer du sein ont-elles rencontré des difficultés pour avoir accès aux soins nécessaires en cette période critique, causée par la Covid-19 et la propagation du virus ?

Les patientes en cours de traitement ont été prises en charge de manière quasi-normale et sans retard. Les patientes déjà traitées et en cours de surveillance ont été priées de retarder les rendez-vous de contrôle.

Hela SAYADI