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La presse | Tunisie | 09/10/2020
Alors que l’offre locale d’oxygène médical peut couvrir un scénario de crise, les structures hospitalières, par manque de lits équipés d’oxygène et de personnel soignant, peinent à prendre en charge les patients en détresse respiratoire.
Le placement sous oxygène du patient Covid-19 en état de détresse respiratoire est une étape décisive dans le processus de guérison. Plus la prise en charge est rapide et précoce, plus les chances de rétablissement sont élevées et celles du passage à un stade avancé de la maladie s’amenuisent.
L’oxygène médical est l’indispensable arme dont doit être pourvu le soignant en première ligne sur le front de la guerre contre le coronavirus. Selon Médecins Sans Frontières (MSF), 80% des personnes hospitalisées à cause du Covid-19 ont besoin entre 3 et 15 litres d’oxygène par minute. Les 20% restants ont besoin de plus de 20 litres par minute. «La quantité d’oxygène indispensable pour la prise en charge des patients varie selon le taux de saturation en oxygène. L’administration de l’oxygène aux malades est une opération délicate. Un excès peut engendrer un empoisonnement du malade. Au contraire, une quantité insuffisante ne peut pas contribuer à l’amélioration de son état de santé et le patient sera toujours en état d’hypoxie», explique Dr Jed Henchiri, président de l’Organisation tunisienne des jeunes médecins (Otjm).
L’oxygénothérapie est, donc, le pilier de la prise en charge des malades Covid-19. Au mois de juin dernier, l’OMS a estimé qu’au rythme d’environ un million de nouveaux cas de coronavirus recensés chaque semaine, le monde a besoin d’environ 620 mille mètres cubes d’oxygène par jour. Pour ce gaz médical, les hôpitaux en sont approvisionnés selon deux méthodes, soit en vrac, et dans ce cas l’oxygène est acheminé vers les hôpitaux qui sont équipés de réservoirs cryogéniques, via des camions-citernes, soit en conditionné, c’est-à-dire dans des bouteilles.
Il n’y a pas de hausse de la demande d’oxygène
Mais au moment où plusieurs pays à travers le monde font face à une pénurie d’oxygène causée principalement par la demande grandissante du gaz médical, la Tunisie a observé une légère baisse de la demande dans les hôpitaux publics, notamment au cours de la première vague de l’épidémie. Cette tendance baissière constatée, depuis l’apparition du virus sur le sol tunisien a été confirmée par Air Liquide et Linde Gas, deux géants de la production de gaz médical qui assurent, avec des proportions proches, les besoins des hôpitaux publics en oxygène en Tunisie. « En ce qui concerne la demande, elle n’a pas augmenté. Depuis le début de la crise sanitaire, à ce jour, on n’a pas constaté une augmentation de la consommation », a affirmé Patrick Deneux le directeur général d’Air Liquide Tunisie dans une déclaration accordée à La Presse. En effet, selon les données communiquées par la société française, la demande des hôpitaux a baissé de 25% au cours des deuxième et troisième trimestres par rapport au premier trimestre de l’année 2020. « Il y a eu une anticipation de la crise sanitaire de la part des autorités sanitaires, donc elles ont libéré des lits autant que possible. Toutes les opérations non urgentes ont été repoussées et finalement l’arrivée des patients Covid-19 a certes entrainé une consommation d’oxygène mais qui était inférieure à la baisse générée par la libération des lits», explique Deneux. Ce même constat a été fait par la société concurrente allemande Linde Gas qui approvisionne le trois cinquième des établissements sanitaires et hospitaliers publics en Tunisie. « Pendant la première vague, nous avons constaté une baisse considérable du volume général par rapport à la même période de l’année dernière. Pour la deuxième vague, à ce jour, nous n’avons remarqué aucune hausse significative de la demande par rapport à l’année dernière », commente Wajdi Ben Raies, responsable commercial de Linde Gas Tunisie.
Les jeunes médecins jettent l’éponge
En effet, cette stagnation de la demande d’oxygène enregistrée au moment où les hôpitaux connaissent un afflux croissant des patients Covid-19 et des cas suspects ayant les symptômes de la maladie s’explique par la capacité très limitée de l’infrastructure sanitaire, notamment publique, à prendre en charge les malades en détresse respiratoire. Et à vrai dire, une abondance du gaz médical est bien confirmée. C’est dans ce sens qu’Air Liquide affirme que sa capacité de production « est bien supérieure à ce qu’elle délivre aujourd’hui » et elle considère « qu’elle peut répondre à une demande qui serait multipliée par trois ». Quant à la société Linde Gas, elle assure que « l’offre locale peut couvrir un scénario de crise ». Mais le problème se pose, au niveau de l’infrastructure sanitaire, plus spécifiquement au niveau des lits d’oxygène dont le nombre est limité. Le secrétaire général de la fédération de la santé, Othman Jallouli, a tiré, à maintes reprises, la sonnette d’alarme sur la situation des systèmes de santé tunisiens qui « sont, désormais, arrivés à saturation ». Samedi dernier, le syndicaliste a affirmé que l’un des hôpitaux universitaires du Grand Tunis a recensé une cinquantaine de malades que la structure n’a pas pu prendre en charge malgré leur état de santé nécessitant un apport en oxygène. Il s’agit du CHU La Rabta. « Le manque de lits d’oxygène est à l’origine de l’aggravation de l’état de santé de plusieurs malades qu’on aurait pu sauver. L’oxygénothérapie, la prise en charge médicale et la surveillance sont les piliers de l’hospitalisation des patients Covid-19. Il y a un problème d’infrastructure. Le dispositif d’oxygénothérapie est un ensemble d’équipements qui doivent être disponibles (comme le barboteur, le masque, etc.) pour administrer la quantité nécessaire d’oxygène au patient. Mais il y a aussi : un problème de personnel », explique Jed Henchiri. Il ajoute « l’hôpital de campagne d’El Menzah ne fonctionne pas à plein régime parce qu’il y a un manque de personnel. Au début de la crise, 160 jeunes médecins se sont mobilisés sur le front de la bataille épidémique. Aujourd’hui, plusieurs ont jeté l’éponge et résilié leurs contrats parce qu’ils étaient sous-payés ou n’ont pas été payés du tout et ils ne sont, actuellement, qu’une trentaine ».
A la date du 5 octobre, le ministère de la Santé a fait état d’un total de 452 patients hospitalisés, dont 124 pris en charge dans les services des soins intensifs. La capacité d’accueil de toutes les structures hospitalières publiques et privées serait de 745 lits dont 195 lits de réanimation. Notons que le ministère de la Santé a décidé, lundi dernier, d’augmenter la capacité de prise en charge des structures hospitalières de 800 lits d’oxygène dans le secteur public (le faisant passer de 400 à 1.200) et de 550 dans le secteur privé (de 150 à 700) vers la fin du mois d’octobre. Une décision qui donne une lueur d’espoir mais qui nécessite la mobilisation de ressources financières conséquentes.
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