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Revue de presse

Nous sommes les soldats en bas de l'échelle...

La presse | Tunisie | 11/01/2019

En un seul mot, les conditions de travail des internes et des résidents dans les hôpitaux sont « médiocres ». Idem pour les conditions de formation et d'apprentissage. Les conditions dans les hôpitaux et les urgences dans lesquelles nous travaillons sont catastrophiques. On enregistre un manque flagrant de moyens logistiques et une insuffisance de l'entretien de ces moyens qui sont dépassés par la science et les nouvelles techniques de développement de la médecine.

Il faut également attirer l'attention sur le manque de ressources humaines, résultat de la fuite des médecins encadrants vers le secteur privé et surtout vers l'étranger. Qui plus est, une pression énorme est exercée sur le secteur qui assure les services de santé pour 80% de la population tunisienne. En contrepartie, l'Etat est démissionnaire et ne prend plus de mesures palpables et significatives en faveur du secteur. On dirait que c'est pré-programmé de le laisser couler et d'oublier son importance capitale pour le peuple.

A cet égard, toutes les conditions de travail et de formation poussent les jeunes à fuir le pays dès la fin de leur cursus. Une telle décision n'est pas surprenante quand on sait que dans de telles conditions, un jeune interne ou résident travaille au moins 60 heures par semaine. A certains moments, on dépasse cette barre pour atteindre 68 heures sans aucun repos ni même une indemnité. Ajoutons à cela le salaire humiliant que reçoit un interne ou un résident dont les efforts contribuent à alimenter les caisses des hôpitaux : à titre d'exemple, un résident en gynécologie peut faire une moyenne de cinq césariennes par jour et un interne peut assurer une centaine d'urgences médico-chirurgicales. De l'autre côté, leur salaire ne dépasse pas les 1.000 dinars. Pis encore, nos jeunes médecins n'ont pas droit à une indemnité de contagion à l'heure où les agents d'administration bénéficient de ce genre d'indemnité.

La goutte d'eau qui fait déborder le vase est que nos jeunes médecins sont traités comme des « bouche-trous », au lieu de profiter de leur présence pour les encadrer et assurer un service médical bien structuré à nos concitoyens. Ces jeunes servent aussi à remplacer l'ouvrier absent, l'infirmier qui refuse de faire son boulot, et même le coursier qui refuse de se déplacer pour récupérer les poches de sang. C'est une sorte de terrorisme académique qui s'exerce sur les résidents et les internes. Dans le cas où on oserait refuser d'accomplir n'importe quelle tâche, on risque de ne pas obtenir la validation de notre stage et notre carrière risque d'être détruite. Tout cela n'est qu'une partie de l'iceberg de la médiocrité et la misère qu'endurent nos jeunes.

Pouvez-vous nous parler de la garde et que proposez-vous pour améliorer la situation ?

C'est la guerre et nous sommes les soldats en bas de l'échelle! On est des médecins compétents, vu qu'on est livré à nous-mêmes dans la plupart des cas. On est des agents de sécurité puisqu'on essaie de mettre de l'ordre dans les urgences. On est les punching-balls des ivrognes, des drogués et des mécontents. On est là-bas pour tout faire : on opère, on suture, on explore, on soigne... Durant les gardes, on doit gérer les urgences, le bloc, les services, la réanimation... Parfois, on a la chance d'avoir un médecin senior sur place pour nous guider et nous encadrer. Mais dans la plupart des cas, on est livré à nous-mêmes et on n'a pas le droit de craquer, ni de se tromper, ni de sentir la fatigue...

Pour les solutions, on a milité pour promulguer un texte de loi qui organise les gardes et on a entamé une grève de 47 jours. Cette protestation a porté ses fruits et, en mars 2018, le texte a été publié au Journal officiel de la République (Jort). Il limite les gardes à 24 heures au maximum et exige l'obligation d'avoir un repos de sécurité obligatoire, de payer les gardes des internes qui restent jusqu'à l'instant sans indemnité, alors que celle du résident est moins d'un dinar l'heure. Autant de promesses vaines qui n'ont pas été tenues car ce décret n'a pas été pris en considération par la tutelle. Aucun texte complémentaire ni circulaire ou même une notification n'a été publié pour l'appliquer.

Constatez-vous un changement de cette situation avant et après la Révolution ?

Le seul point positif après la Révolution, c'est la liberté d'expression et d'organisation. Mais cet acquis est bafoué puisque les autorités ont gagné le droit de faire la sourde oreille et de punir toute tentative de changement.

Le gouvernement prend-il, aujourd'hui, les choses au sérieux pour améliorer la situation, notamment après la série de protestations et de grèves que vous avez entamée ?

Le gouvernement ne prend pas la crise des jeunes médecins au sérieux. Après la série de grèves qu'on a entamée, l'Etat a signé deux accords avec l'Otjm. Mais ces derniers ne servaient qu'à faire l'éloge des ministres qui ne prennent pas en considération l'avenir de la médecine et de la santé. Le cri d'alarme a été lancé à maintes reprises pour arriver à un consensus, capable de résoudre ces problèmes et de satisfaire les besoins et les attentes des deux parties. Mais ce projet est tombé à l'eau face au silence indifférent du gouvernement qui nous a punis. Donc, on est une fois de plus obligé de bouger, manifester, entamer des grèves contre ces mesures punitives et d'exercer une pression pour appliquer les accords signés... Malheureusement, nos décideurs n'ont pas encore senti le vent de la révolution des jeunes. Ils nous traitent comme des mineurs pour nous teni en main et continuer à couvrir les défaillances de leur système.

Est-ce que vous avez vécu un incident inoubliable ?

Je n'oublierai jamais quand on m'a convoqué pour assister au « lynchage » de mon collègue à cause d'un statut publié sur Facebook, imprimé et diffusé par fax à tous les séniors. Une réunion urgente a été convoquée pour délibérer sur ce statut qui dénonce le comportement de certains de nos chefs... C'était en mars 2018; les jeunes en grève depuis plus d'un mois, la situation sous tension, les hôpitaux paralysés, les jeunes sous tension... Cet incident a marqué un tournant décisif dans ma vie professionnelle.

Pouvez-vous nous parler de la relation entre les résidents et internes et les chefs de service ?

Pour les chefs de service, il y a une minorité qui garde le poste juste pour détourner les patients des hôpitaux publics vers les cliniques ou les cabinets spécialisés. Il y a d'autres (qui sont aussi une minorité) qui profitent du secteur sans donner la moindre importance à la formation des jeunes. Mais de l'autre côté, il y a ceux qui sacrifient leur repos pour assurer la continuité de la formation médicale et sa qualité. Grâce à eux, on est aujourd'hui parmi les meilleurs en Europe et même en Amérique.

En mars dernier, le ministère de la Santé a publié le nouveau statut régissant l'activité des jeunes médecins internes et résidents.

Ce statut met-il fin au différend opposant les jeunes médecins aux autorités ?

On est encore victimes de mesures punitives suite au mouvement 76. Les accords signés avec les deux anciens ministres (Imed Hammami et Samira Meraii) n'ont pas été honorés. Malgré ce bras de fer, on ne compte pas baisser les bras et on a entamé de nouvelles discussions avec l'actuel ministre. Actuellement, on attend un signe positif de sa part. Dans le cas contraire, l'Otjm va appeler à de nouvelles protestations et le combat se poursuit. Après les prochaines élections au sein de notre organisation, les nouveaux dirigeants vont certainement prendre le flambeau et continuer à militer.

Après avoir achevé ses études, le médecin est appelé à travailler bénévolement pendant une année dans les zones internes. Or, il n'y a aucun critère d'exemption. Faut-il lever le ton et mettre le doigt sur ce qui ne va pas pour arranger les choses ?

Les exemptions du service civil ont été accordées le 08 mars 2018 par l'ex-ministre de la Santé, Imed Hammami. Mais ceci reste un simple accord signé sur le papier car jusqu'à l'instant, il n'existe pas de circulaire qui exige la formation de la commission qui traitera le dossier. Le 31 décembre 2018, la Direction générale de la santé m'a explicitement informé que le ministère n'honorera pas son engagement sur ce point.

La réforme du système des études médicales représente-t-elle un autre souci majeur pour les jeunes médecins ?

L'un des objectifs du mouvement 76 était de réformer le système des études médicales et de mettre à nu ses défaillances. On a réussi à s'imposer (en partie) et on a forcé les autorités (notamment) académiques à prendre en compte notre avis. Le texte de la nouvelle réforme a été signé par le nouveau ministre.

Quelles sont vos attentes et vos revendications ?

J'ai demandé officiellement en ma qualité de président de l'Otjm, organisme qui représente la majorité écrasante de jeunes médecins, la révision à la hausse des salaires, la révision des primes de garde et l'obtention d'une indemnité de contagion. Je n'ai pas eu de réponse en dehors d'un accord de principe. Mais je pense que cette demande doit être suivie, et que les jeunes médecins doivent entamer de nouveaux mouvements pour améliorer leurs conditions si la tutelle ne se montre pas coopérative.

Que proposez-vous pour réformer ce secteur ?

Il faut que nous (syndicats, société civile et peuple) exigions plus d'attentions à l'égard de ce secteur face à un gouvernement qui semble démissionnaire. Il faut insister sur le fait que ce secteur ne doit en aucun cas être délaissé. Il doit être sous le contrôle exclusif de l'Etat pour garantir la sécurité sanitaire du peuple. D'où la nécessité d'arrêter ce partenariat déséquilibré et nocif entre les secteurs privé et public. Il faut renforcer la logistique et les ressources humaines dans le secteur public et expulser immédiatement les mafias de corruption sans faire de demi-mesures et surtout améliorer les conditions matérielles et sécuritaires des médecins. Le public doit devenir un secteur de référence et du bon apprentissage. L'Etat doit arrêter les mesures inhumaines et essayer de rendre ce secteur attirant et non repoussant.

Par Meriem Khdimallah

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