Sollicitée par La Presse pour nous présenter cette expérience et évaluer les résultats obtenus, le Pr Amel Mrabet, chef du service de neurologie à l’EPS Charles-Nicolle, a tenu tout d’abord à remercier ses patients épileptiques qui lui ont fait confiance, ainsi que tous les membres de son équipe qui, dit-elle, s’est préparée depuis deux ans au bilan préchirurgical des épilepsies pharmaco-résistantes. «Ce travail, nous a-t-elle confié, a été grandement facilité par le soutien des autorités de tutelle et la direction de l’EPS Charles-Nicolle, car il s’agissait de constituer une longue chaîne clinico-radiologique soutenue par des médecins neurologues formés aux techniques et à l’interprétation de la vidéo-encéphalogramme numérisée avec la collaboration de confrères du CHU Charles-Nicolle de Rouen qui est uni par les liens du jumelage au CHU Charles-Nicolle de Tunis.

Après une localisation exacte de la zone épileptogène responsable des crises d’épilepsie, les patients ont été ensuite confiés au service de neurochirurgie du Pr Néjib Hattab pour une hippocampectomie (ablation chirurgicale d’une partie de l’hippocampe, région interne du lobe temporal du cerveau). Le résultat enregistré dépasse nos espérances, les premiers patients opérés en mai 2006 se portent aujourd’hui très bien».

«Cette expérience pilote, ajoute Pr Amel Mrabet, va continuer puisque toute l’infrastructure technique et humaine est en place et qu’une longue liste d’attente de jeunes patients épileptiques nous interpelle tous les jours. Cette longue chaîne doit résister à tous les écueils pour pouvoir offrir à nos patients les meilleurs soins, dans les meilleures conditions, comme nous y invite Son Excellence le Président Zine El Abidine Ben Ali».

Témoignage du succès de ce nouveau traitement qui transforme la vie de l’épileptique, ces impressions que nous livre Melle Kh. N. la première malade épileptique tunisienne à bénéficier de cette chirurgie : «J’ai souffert d’une épilepsie pharmaco-résistante depuis 25 ans. J’avais des crises partielles trois fois par jour. En mai 2006, j’ai subi une intervention neurochirugicale qui est une grande victoire pour moi, comme pour les équipes médicale et chirurgicale de neurologie de l’EPS Charles-Nicolle de Tunis et du service de neurochirurgie de l’hôpital Fattouma-Bourguiba de Monastir. Mon état de santé était déplorable, je souffrais énormément de mon épilepsie, je n’arrivais pas à vivre “normalement”. J’étais dans un autre monde, un monde à part. Je me suis décidée alors à tenter ce traitement qui a changé ma vie. J’y ai cru très fort depuis le début. Mail il m’a fallu quand même beaucoup de courage vu que j’étais la première malade épileptique en Tunisie à opter pour cette intervention. J’ai fait confiance à mon médecin traitant, ainsi qu’à toute l’équipe médicale du service de neurologie de l’EPS Charles-Nicolle.

Depuis cette opération, je n’ai eu aucune crise, c’est la fin du cauchemar et grâce à cette intervention, je suis sauvée, je renais. Les périodes pré-chirurgicale et post-chirurgicale se sont bien déroulées, j’ai été suivie de très près par les médecins, ils m’ont même soutenue moralement et cela a été très rassurant pour moi. L’espoir qu’offre cette opération aux malades opérables est impressionnant, ça change toute une vie. Vivre sans crises, pour moi, était un rêve, un rêve qui se réalise enfin. A tous ceux qui souffrent et qui doutent, je dis : il faut y croire jusqu’au bout et faire confiance à la médecine, j’en suis la preuve vivante».

S.R.