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La presse | Tunisie | 01/12/2016
Deux décisions viennent d’être récemment prises pour résoudre le problème de la pénurie des médecins spécialistes dans les régions et seront bientôt examinées lors d’un conseil ministériel. La pénurie des médecins spécialistes dans les régions va-t-elle enfin être résolue ? Le ministère de la Santé vient de mettre, en effet, la dernière touche à deux décisions qui seront bientôt soumises à un conseil ministériel restreint.
Pour pouvoir combler le vide dans les régions qui accusent le plus grand déficit en médecins spécialistes et qui sont, à ce titre, assimilées à des « déserts médicaux », le ministère de la Santé a déjà mis depuis l’année dernière un programme destiné à renforcer la présence des médecins spécialistes dans les zones prioritaires.
Des conventions ont été signées avec des médecins spécialistes travaillant dans les CHU et exerçant dans le secteur privé afin qu’ils assurent en alternance des journées de 24h dans les hôpitaux qui souffrent le plus du manque de médecins dans le but de garantir la continuité des soins dans huit spécialités dites essentielles, à savoir la gynécologie obstétrique, la pédiatrie, la radiologie, l’anesthésie-réanimation, l’orthopédie traumatologie, la chirurgie générale, la réanimation médicale et la cardiologie.
L’autre solution « miracle », qui a fait l’objet d’une décision qui sera exposée au cours d’un prochain conseil ministériel, est l’ajout d’un nombre supplémentaire de postes au concours de résidanat qui est l’épreuve incontournable que doit passer chaque médecin pour effectuer une spécialité. Généralement le choix de cette spécialité dépend du classement dans le concours. En effet, les médecins qui veulent devenir spécialistes n’ont pas la possibilité de choisir la spécialité qu’ils souhaitent. Ils sont affectés aux postes en fonction de leur classement dans le concours.
C’est à ce niveau que le ministère a décidé d’apporter une légère nuance. Pour les médecins qui n’ont pas obtenu la spécialité qu’ils désirent à cause de leur classement au concours, ils ont la possibilité d’y être affectés à condition de s’engager, après avoir terminé leur formation, à exercer quatre à cinq ans dans un hôpital régional préalablement défini.
Une autre proposition tout aussi importante figure parmi les solutions qui seront exposées au conseil des ministres: les résidents devront passer deux mois au cours des deux dernières années de leur résidanat dans un établissement hospitalier régional, encadrés par les professeurs et assistants des services où ils sont normalement affectés, ceux-là mêmes qui contribuent au programme de renforcement des régions prioritaires par les médecins spécialistes en assurant des journées de permanence de 24 heures dans les hôpitaux régionaux, a souligné, à ce propos, le docteur Faouzi Mehdi, chargé de mission au cabinet du ministre de la Santé.
Déficit de médecins spécialistes dans les régions : un vrai casse-tête
Cela fait plus de cinq ans que le ministère de la Santé s’échine à trouver des solutions au problème du déficit des médecins dans les régions. Il faut revenir à la répartition et l’affectation des médecins spécialistes sur l’ensemble des établissements hospitaliers pour comprendre les origines du problème.
Deux tiers des médecins spécialistes exerçant dans le secteur public sont des universitaires qui travaillent dans les grands centres médicaux (CHU structures de troisième ligne) essentiellement concentrés dans les grandes villes de Tunis, Sousse, Monastir et Sfax.
Seuls 31% de l’ensemble des médecins spécialistes que compte le pays ont été affectés et exercent dans les hôpitaux régionaux répartis sur tout le territoire, ce qui est insuffisant pour couvrir les besoins de ces régions en soins spécialisés. En 2010, le non-renouvellement des contrats des médecins étrangers qui travaillaient dans les structures de seconde ligne n’a fait qu’aggraver le problème de l’insuffisance des médecins spécialistes dans ces établissements et a contribué à creuser davantage le vide dans les régions qui se sont retrouvés sans aucun praticien dans certaines spécialités. « Malgré les mesures incitatives qui ont été prises pour encourager les médecins à s’implanter dans les régions, ils ont la possibilité d’exercer une activité complémentaire rémunérée dans le privé et ils bénéficient d’une prime conséquente pour ceux qui choisissent de s’installer dans les régions, beaucoup de médecins ont présenté leurs démissions et se sont orientés vers le secteur privé.
Cette inégalité, causée, entre autres, par les départs massifs vers le secteur privé, se reflète à travers la concentration des médecins qui diffère d’une région à une autre. Alors que dans le Grand-Tunis, la concentration est la plus forte et s’élève à 186 médecins pour 100.000 habitants, c’est dans les gouvernorats de Tataouine, Sidi Bouzid, Siliana, Kasserine et Kébili que la concentration est la plus faible. On y compte, en effet, en moyenne entre 12 et 20 médecins pour 100.000 habitants.
Pour remédier à ce problème, un accord a été signé entre le ministère de la Santé et l’Ugtt qui stipule que tout médecin, après avoir réussi à l’examen de fin de spécialité, effectuera une année de service national dans un hôpital régional selon les besoins du ministère. Cet accord vient suite aux pourparlers engagés pour trouver une solution alternative à la loi proposée par Abdellatif El Mekki qui avait notamment proposé un travail obligatoire de trois ans dans un hôpital régional soulevant l’ire des médecins et des étudiants en médecine qui se sont farouchement opposés à cette décision, rebutés par l’idée de passer plusieurs années dans des régions qui manquent d’attractivité, où ils sont éloignés de leur famille et où ils ne pourraient pas poursuivre leurs travaux de recherche sans compter les conditions de travail difficiles (absence de plateau technique dans certains établissements hospitaliers...).
Malgré les incitations financières qui ont été prises pour encourager les médecins spécialistes à travailler dans les structures de deuxième ligne et bien que la porte du recrutement n’ait été jamais fermée et malgré la signature de conventions avec des praticiens exerçant dans les secteurs public et privé afin d’assurer des permanences garantissant la continuité des services dans les hôpitaux régionaux, le problème de l’insuffisance des médecins spécialistes n’a toujours pas été résolu. Les décisions récentes qui ont ont été prises par le ministère et qui seront soumises au conseil des ministres arriveront-elles à inverser la donne dans le futur ? Seul l’avenir nous le dira.
I.H.
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