Un média spécialisé, à savoir notre confrère « Livret santé », a pu ingénieusement organiser avec succès un tel évènement. « Pas contre le diabète » a, en effet, connu une grande affluence tellement le concept était savamment pensée, ce qui n’a pas manqué d’offrir de nombreux temps forts aux participants et qui ont mis la Cité sportive d’El Menzah, le temps d’une demi-journée, aux couleurs de la santé et du bien-être, et ce, au grand bonheur des familles, des acteurs de la santé, en plus des représentants de la société civile tunisienne et de quelques officiels.

A l’entrée, des oriflammes avec un dessin de Chedly Belkhamsa balisent la voie à deux rangées de stands où des institutions, des associations et des sociétés privées proposent conseils, procèdent au dépistage ou proposent des produits sans sucre. Onfp, Office du thermalisme, direction régionale de la santé, Dssb (direction des soins de santé de base), Samur La Marsa, OMS, la Société tunisienne de diabétologie et de maladies métaboliques, la Cropa (conseil régional de l’Ordre des pharmaciens de l’Ariana) et le Cropt, conseil régional de l’Ordre des pharmaciens de Tunis, et bien d’autres acteurs dans le domaine de la santé étaient tous là.

« Cela fait cinq ans que j’édite des magazines spécialisés dans la santé destinés aux médecins et pharmaciens de Tunisie et c’est vrai que nous les journalistes quand on se spécialise, on devient plus sensibles aux questions qu’on traite. C’est ainsi que petit à petit, je me suis sentie très concernée par trois problématiques, à savoir le diabète, le tabac et l’allaitement. Je cherchais une idée pour rassembler les gens et leur passer des messages simples, car on ne donne pas de leçons. On essaye juste de donner des conseils, on ne culpabilise pas les gens. On leur dit que c’est facile, que ça ne coûte pas de l’argent. Donc, j’ai commencé par le diabète, car on était en pleins préparatifs de la Journée mondiale du diabète. Alors je me suis dit lance-toi, c’est le moment. Certes, il fallait beaucoup d’énergie. Car il fallait réunir atour de cette action toutes les parties concernées. En effet, seuls, ils font beaucoup d’actions mais en les rassemblant je leur donne beaucoup plus de visibilité. J’ai réussi à ramener toutes les institutions qui dépendent du ministère de la santé et d’autres. Il y a aussi beaucoup d’entreprises privées, soit qu’elles fabriquent des produits sans sucre, des pâtisseries sans sucre, l’eau et puis notre partenaire principal qui fabrique de l’insuline est un laboratoire danois », souligne Senda Baccar, éditrice du magazine « Livret Santé » et des journaux « Médicinfo » et « Phramainfo », initiatrice de cet évènement.

« C’est une opération que j’aimerais renouveler dans toutes les régions de la Tunisie avec tous ces gens sachant bien que 90% des cas de diabète pourraient être évités et qu’en Tunisie nous avons une prévalence énorme de 15% de diabétique sachant que ce chiffre n’est pas tout à fait précis, car il y a des patients non diagnostiqués et que ce chiffre peut atteindre le double. C’est une maladie silencieuse », ajoute-t-elle.

Trois niveaux, trois couleurs

On approche avec empressement, les premiers marcheurs du parcours. Une signalétique leur indique clairement le sentier à suivre : vert pour les enfants de six à 12 ans, bleu avec une difficulté moyenne pour les 65 ans et plus et rouge pour les adultes de 12 à 65 ans. Le principe est simple, il consiste à faire cinq fois le parcours en marche sportive et à la fin de chaque tour ils prennent un élastique et une fois les cinq élastiques en main, ils ont droit à un diplôme. Au fait, c’est une astuce pour les inciter et achever cinq tours, ce qui est l’équivalent d’une demi-heure de marche à pied proprement indiquée par les médecins pour prévenir cette maladie.

Immédiatement, les marcheurs, élastiques en main, font la file devant un calligraphe, qui est là pour inscrire leurs noms sur les diplômes. Le parcours ne s’achève pas là, on pose au sharing box pour une photo avec diplôme en main qui sera instantanément partagée sur les réseaux sociaux, et envoyée sur l’e-mail de ces mêmes personnes.

Parmi la foule, on distingue la présence de Hend Chaouch qui est venue avec sa voiture de rallye, Hayet Jabnoun et Miss Tunisie. Elles sont venues soutenir la cause des diabétiques en Tunisie, nous dis-t-on. Une activité intense couplée au brouhaha de la musique et des appels intermittents des organisateurs règnent sur les lieux. Les badauds, les yeux grand écarquillés, regardent d’un air étonné, des personnes en train de se faire ausculter, de mesurer leur glycémie ou de se faire conseiller.

Des appareils photo en bandoulière, les visiteurs se sont arrêtés à maintes reprises pour immortaliser l’instant par le cliché. Ce fut une fête foraine, sonore authentique et pleine d’émotion, emmenée par un élan spontané et une participation massive où l’espace dépistage et conseil en nutrition aura été un point focal.

Des actions recommandées

Ce genre d’action est recommandé. Car un plan de lutte contre le diabète ne peut se concevoir de façon isolée, il doit être intégré dans une campagne de prise en charge globale des facteurs de risques le plus souvent associés et sensibles aux mêmes mesures préventives. Cette politique de prise en charge globale est celle préconisée en Tunisie, comme ailleurs, par les recommandations internationales de pratiques médicales. Le dépistage doit être généralisé dès la médecine de première ligne, et doit concerner à la fois la mesure du sucre dans le sang, mais aussi des graisses (cholestérol et triglycérides) dont les taux sont aussi souvent élevés chez les diabétiques, et de la pression artérielle (la « tension »). Au delà de ces gestes simples qui ont tendance à se généraliser, mais insuffisamment, il y a aussi l’éducation à la santé, qui est la responsabilité de tous, dont celle des médias, des médecins et professionnels de santé, des écoles, des cantines scolaires, etc.

Des messages simples

Des messages simples ne sont pas assez connus : bouger plus, marcher, regarder moins la télévision, manger plus sain, moins de sucre, moins de graisses, moins de sel et globalement moins de calories. Il faut multiplier ces messages à travers tous les acteurs : écoles, médias, la médecine du travail… Des campagnes doivent être répétées régulièrement. Lorsqu’ils sont connus ces conseils ne sont pas assez appliqués par manque de motivation, laisser-aller, mauvaises habitudes alimentaires ‘traditionnelles’ (le couscous avec du mouton gras, les merguez trop salés, les pâtisseries et autres thés à la menthe trop sucrés, etc.).

Donc un vrai changement des habitudes alimentaires est nécessaire et les succès dans ce domaine sont très difficiles à obtenir. L’Etat peut intervenir sur d’autres leviers, encore plus difficiles à actionner, et insuffisamment mis en œuvre : les industries agro-alimentaires et les commerces de grande distribution doivent être incités à offrir des aliments plus sains, tant la part des aliments tout prêts, fast-food et aliments conditionnés ou en conserve est devenue trop grande dans le pays. Tous ces aliments sont riches en calories, en gras, en sucre et en sel.

Auteur : Chokri BEN NESSIR