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El Watan | Algérie | 03/06/2007
Sachez, docteur Boukhaloua, qu’une des règles universelles régissant le fonctionnement des centres de dialyse est qu’il faut être néphrologue pour pouvoir y exercer ; pourquoi en serait-il autrement chez nous ? Et cela pour les raisons évidentes suivantes : avant d’être dialysé, l’insuffisant rénal est suivi par un néphrologue qui va continuer à le suivre durant toute sa vie de dialysé pour le préparer et pouvoir, enfin, le greffer dans de bonnes conditions et ensuite le suivre durant toute sa vie de transplanté. L’insuffisant rénal chronique ne doit pas être vu seulement sous son aspect de dialysé, mais doit être considéré globalement comme quelqu’un qui avait un passé clinique, qui a un présent thérapeutique (la dialyse) et qui sera préparé à un futur de transplanté rénal.
L’hémodialyse n’est qu’un aspect thérapeutique intégré parmi les autres méthodes thérapeutiques : le traitement médicamenteux, la dialyse péritonéale et enfin la greffe rénale. La présence du néphrologue est essentielle durant toutes ces phases thérapeutiques indissociables ; vouloir restreindre la néphrologie à la seule hémodialyse pour la confier à un non-néphrologue c’est compromettre le pronostic vital de ces patients. Le Dr Boukhaloua cite les mauvais exemples de la dialyse péritonéale qui est une méthode universellement reconnue ; il faut savoir qu’elle nous a permis de sauver de nombreux malades et qu’elle peut être le seul traitement palliatif ; de nombreux malades actuellement en hémodialyse ont survécu grâce à la dialyse péritonéale.
Ce ne sont pas les néphrologues qui sont à l’origine de la situation actuelle des centres de dialyse, mais bien au contraire, c’est la mauvaise politique menée à leur insu par quelques décideurs de l’époque et qui étaient tout à fait étrangers à la spécialité. Ces derniers avaient comme seul objectif d’accaparer la dialyse et d’avoir la mainmise sur la greffe rénale. En fait, ils ne retenaient de la néphrologie, cette si grande spécialité, que ce qui était important du point de vue commercial et politique. La prévention, la création des services de néphrologie et le manque de laboratoires de pointe dont souffre cette spécialité ne les intéressaient pas. Afin d’affaiblir la communauté néphrologique, qui avait du mal à s’organiser, ils ont toujours répandu auprès des instances la fausse image du néphrologue algérien incapable de résoudre les problèmes de prise en charge de l’insuffisant rénal chronique expliquant en partie le départ de plusieurs néphrologues en France où on est très heureux de les accueillir.
Les pouvoirs publics, pour pallier le déficit de néphrologues, ont permis à des généralistes de travailler dans les centres de dialyse. Depuis quelques années, nous essayons de former plus de néphrologues ; mais nous risquons, les années à venir, d’avoir de moins en moins de nouveaux résidents de 1re année si les centres de dialyse privés sont pris d’assaut par des non-néphrologues. Ce qui serait catastrophique pour l’avenir avec un très grand nombre d’hémodialysés en piteux état (insuffisants cardiaques, avec des déformations osseuses importantes, des hépatites virales compliquées etc.) et un frein ou une réduction de la greffe rénale.
Ces médecins généralistes, qui ont exercé dans des centres de dialyse, devraient pouvoir obtenir une compensation qu’il faudrait définir mais il faudrait aussi mettre un terme au recrutement de nouveaux médecins généralistes. Nos voisins marocains, qui avaient institué une législation rigoureuse toujours en vigueur, régissant l’ouverture des premiers centres de dialyse et notamment le recrutement obligatoire de néphrologue, n’ont pas les mêmes problèmes que nous. Pour terminer, je me demande si l’on s’intéresserait autant aux centres de dialyse s’il n’y avait aucun profit à en tirer ?
L’auteur est : Professeur, président du comité
pédagogique de néphrologie
Pr Kaddous
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