Le président du Syndicat National des Praticiens de la Santé Publique (SNPSP) confirme que la situation épidémiologique s’est nettement détériorée ces deux dernières semaines et devient, selon ses dires, inquiétante, craignant qu’elle n’empire davantage, surtout durant la saison estivale, ouverte officiellement le 1er juillet.

Contacté à ce sujet, le Dr. Lyes Merabet affirme que la courbe des contaminations est ascendante depuis plusieurs semaines et évolue régulièrement. « C’est le constat que nous faisons en tant que citoyens mais aussi en tant que professionnels de santé. De plus en plus de malades arrivent en consultation présentant des symptômes de la Covid-19, même si les cas diffèrent d’une personne à une autre. Heureusement, la plupart du temps, il s’agit de symptômes simples à modérer. Cependant, des cas graves sont également enregistrés et nécessitent des hospitalisations et des places de réanimation pour certains. On ne sait même pas quand on atteindra le pic ».

Selon le praticien, même si nous avons franchi la barre des 500 nouveaux cas par jour, ce chiffre est loin de refléter la réalité et le nombre de malades est plus élevé. « Pour preuve, les services réquisitionnés auparavant pour la prise en charge des personnes atteintes du Coronavirus, notamment la chirurgie, la pédiatrie et la médecine interne, l’orthopédie, la neurologie et qui avaient repris leurs activités après l’amélioration de la situation de l’épidémie sont malheureusement de nouveau sollicités pour l’hospitalisation des malades en vue de disposer de plus de lits de réanimation. La situation est la même au niveau des consultations et des pavillons d’urgences où le nombre de malades a augmenté, consultant pour un syndrome grippal. Ces symptômes vont avec le diagnostic de la Covid. Le constat est le même au sein des services de radiologie et des laboratoires où les malades sont orientés pour une exploration. »

187 médecins décédés depuis le début de la pandémie

Les professionnels de la santé expriment à cet effet leur inquiétude devant cette recrudescence et assurent que cette situation «va sans doute certainement se répercuter» sur le personnel de la santé, 13.500 professionnels de la santé secteurs privé et public sont touchés par la Covid-19, 234 personnes sont décédées parmi lesquelles 187 médecins.

Le président du SNPSP affirme que cette situation est imputable à des facteurs exogènes qui sont dans la nature de l’évolution de la pandémie et à des facteurs endogènes sur lesquels on peut agir. Cela dit, il n’a pas caché ses craintes quant à l’aggravation de la situation de la pandémie, notamment avec la saison estivale et l’Aïd El Adha qui peuvent constituer des facteurs de propagation du virus et favoriser la contamination, la saison estivale est la période des congés et des déplacements, d’où l’augmentation des risques de contamination. Retour au confinement ? L’option est en tout cas envisageable, aux yeux du Dr. Merabet, du moins dans certaines wilayas. « Il faut mettre en place des mesures rigoureuses pour endiguer le risque de propagation », plaide-t-il, jugeant importance d’accélérer la cadence de la campagne de vaccination qui reste essentielle dans la prise en charge de la crise sanitaire. Il considère qu’il faut agir sur trois principaux axes. Il s’agit d’abord de la sensibilisation et de la communication pour sensibiliser les citoyens au respect des mesures barrières et des protocoles sanitaires, y compris avec des mesures coercitives pour les récalcitrants. Ensuite la mise en place d’un circuit de prise en charge des malades et d’une organisation au niveau des consultations et des urgences, afin de permettre la création d’un couloir propre aux cas de Covid. Et enfin la vaccination en elle-même, axe majeur de l’opération pour mettre fin à la propagation du virus. « Bien qu’elle ait accéléré ces deux dernières semaines avec des quantités de vaccins assez conséquentes distribuées, l’opération reste encore loin des objectifs fixés, à savoir vacciner au moins 18 millions de citoyens pour espérer arriver dans des délais raisonnables à un taux de couverture vaccinale de 50 à 60 % de la population. C’est la condition pour atteindre 70 à 80 % d’immunité collective avec le nombre de personnes qui ont contracté le virus et ayant développé une immunité naturelle ».

Le président du SNPSP admet que notre pays est encore loin de cet objectif puisque jusqu’à présent, environ 2,5 millions citoyens y compris le personnel de santé ont été vaccinés depuis le début de la campagne. « Aller vers cet acte vaccinal salutaire est plus qu’indispensable pour sortir de cette situation de pandémie. Certains pays ont avancé en matière de vaccination et, grâce à la généralisation de la vaccination, aller vers l’allègement des mesures barrières et l’ouverture de plusieurs activités culturelles et sportives ».

Kamélia Hadjib

Pour mettre le vaccin à la disposition des citoyens

Levée des barrières bureaucratiques

Le directeur général des structures sanitaires au ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Lyes Rahal, a affirmé que "toutes les barrières bureaucratiques" avaient été brisées en vue de mettre le vaccin anti-Covid-19 à la disposition de l'ensemble des citoyens au niveau des espaces publics et des établissements mobilisés par le ministère dans le cadre de la campagne de vaccination. Dans une déclaration à l'APS, M. Rahal a précisé que "l'Institut Pasteur d'Algérie a distribué les vaccins anti-Covid-19 dans toutes les wilayas du pays et que les citoyens n'ont qu'à se déplacer aux établissements et espaces publics pour se faire vacciner". Estimant que "les citoyens ne pourraient désormais présenter aucune excuse pour ne pas se faire vacciner", le responsable a souligné que le vaccin "reste le seul moyen de prévention contre la propagation du Coronavirus, outre le strict respect des gestes barrières auxquelles ont appelé les autorités publiques", rappelant la poursuite des efforts pour l'importation de quantités suffisantes de vaccin au cours du mois de juillet en cours et d'août prochain. Le Pr. Rahal a exhorté, à cette occasion, les citoyens à intensifier les efforts pour une lutte contre la Covid-19 et "un retour à la vie normale". En ce qui concerne le renforcement des capacités d'accueil des hôpitaux en termes de lits pour faire face à l'augmentation du nombre de cas Covid-19 durant les derniers jours, le même responsable a fait état de 2.000 lits d'hospitalisation et de 230 autres pour la réanimation à travers le pays, soulignant que le ministère avait pris en considération l'expérience des précédentes vagues qu'a connues le pays en vue de réunir les conditions favorables à la prise en charge des malades de Covid-19".

Pour faire face à la hausse des cas dans la capitale où il y a une forte densité de population, les hôpitaux des wilayas de Tipasa et de Blida sont appelés à la rescousse. Le chef du service d'épidémiologie à l'Etablissement hospitalo-universitaire (EHU) de Blida, Abderrezak Bouamra, a insisté sur la nécessité pour les Algériens de se faire vacciner et de respecter les gestes barrières pour briser la chaîne de transmission de la Covid-19. "Les gens sont aujourd'hui conscients de la nouvelle vague de contamination qui ne peut être stoppée qu'à travers la vaccination et le respect des mesures barrières", a-t-il soutenu, mettant en garde contre le variant britannique qui est en train de gagner du terrain chez nous, selon les analyses des cas hospitalisés récemment.

Concernant la vaccination, dont 2 millions d'Algériens ont bénéficié à ce jour, il a estimé que "ça reste très en-deçà des objectifs tracés", invitant les pouvoirs publics à "acquérir davantage de doses pour briser la chaîne de transmission". Il a également appelé les citoyens à tirer profit de l'expérience des Etats qui ont vacciné un grand pourcentage de leurs citoyens, ce qui leur a permis de retrouver une vie normale. Dans une déclaration en marge de la cérémonie de lancement de la campagne de vaccination au profit des travailleurs de la Caisse nationale de sécurité sociale des non-salariés (CASNOS) et de leurs proches, au Centre familial de la caisse à Ben Aknoun (Alger), le porte-parole du Comité scientifique de suivi de l'évolution de la pandémie du Coronavirus, Djamel Fourar, avait assuré qu'"aucun risque sur la santé publique n'a été enregistré depuis le lancement de la campagne de vaccination en janvier dernier". La stratégie nationale de vaccination vise à rapprocher le vaccin des citoyens en le mettant à la portée de tous, dans les établissements de santé ou dans les espaces publics de proximité, pour leur permettre de se faire vacciner sans rendez-vous ni préinscription, a-t-il dit. Et d'ajouter que "le principe visant à rapprocher le vaccin des travailleurs des différents secteurs, en collaboration avec la Caisse nationale des assurances sociales (CNAS) et l'Union générale des travailleurs algériens (UGTA), tend à permettre une reprise des activités économiques qui ont stagné dans tous les pays du monde à cause de cette pandémie".