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Revue de presse

« Une bonne partie du personnel de santé n’a pas les moyens de protection indispensables »

El Watan | Algérie | 01/04/2020

Djamel Zoughailech est professeur en épidémiologie et médecine préventive au CHU de Constantine. Il est, entre autres, membre fondateur des Semep en Algérie et membre chargé du département scientifique de la Fédération africaine des associations de santé publique. Dans cet entretien, il lève le voile sur la situation de la lutte contre la propagation du coronavirus en Algérie et livre quelques pistes pour s’en sortir à moindres frais et tirer les bonnes leçons au terme de cette crise sanitaire mondiale.

Notre pays et toute la planète traversent une crise sanitaire aiguë et inédite à cause du coronavirus, qu’en pensez-vous ?

Cette pandémie a surpris le monde entier, même l’Organisation mondiale de la santé. Repéré en Chine et signalé à l’OMS le 31 décembre 2019, le virus SARS-CoV-2 (qui cause la maladie au Covid-19) a été déclaré le 11 mars pandémie. Certaines incertitudes au sujet de cette épidémie persistent, notamment son ampleur, et on ignore encore sa durée.

On compte à ce jour plus de 450 000 cas infectés et près de 24 000 décès dans le monde, mais la proportion d’infections non détectées est inconnue.
On ignore aussi la contagiosité du virus - en moyenne le nombre de personnes que chaque malade va infecter, l’OMS estime que le R0 est compris entre 1,4 et 2,5 - à quoi s’ajoute la létalité de 0,2% chez les moins de 39 ans à 8% chez les malades âgés de 70 ans et plus. Pour les formes sévères 13 à 17 % des cas, avec une durée moyenne d’hospitalisation de 11 jours (+/- 4 jours).
Toutes ces inconnues font du SARS-CoV-2 un virus à fort potentiel épidémique qui a complètement déstabilisé les systèmes de santé de grandes puissances et impacté durement leur vie sociale et économique.

En tant qu’épidémiologiste, que pensez-vous des mesures préventives décidées par le gouvernement contre le Covid -19 ? Ont-elles été prises à temps ? Sont-elles suffisantes ?

En Algérie, depuis le coronavirus a fait son apparition le 21 février 2020 et à ce jour nous avons détecté 367 cas de Covid-19 dans 36 wilayas dont 29 guéris, 311 hospitalisés et 25 décès (chiffres officiels du 26 mars date de l’entretien, ndlr). On est encore loin des situations qu’a connues l’Asie et que vit l’Europe, épicentre actuel de la pandémie. On a donc eu le temps de voir venir.

Vu l’expérience de ces pays et conformément aux directives de l’OMS, les mesures préventives décidées par le gouvernement sont des mesures de bon sens qui sont adaptées au contexte épidémiologique local. Maintenant, il faut avoir les moyens de les appliquer.
Et revoir l’organisation, la coordination et le fonctionnement des services publics dans la gestion de ce risque à l’échelle locale. Sont-elles suffisantes ? Je ne pense pas. Elles devront évoluer en fonction du degré d’atteinte des régions du pays. La stratégie de réponse sanitaire est définie en fonction de la cinétique de l’épidémie au Covid-19 qui se décline en trois phases.
Les phases 1 et 2 d’endiguement consistent à freiner l’introduction du virus et sa propagation sur le territoire national par des mesures d’endiguement (fermeture des frontières, confinement des suspects, etc.). C’est fait. Nous sommes passés depuis quelques jours à la stratégie d’atténuation (phase 3, lorsqu’il y a une circulation active du virus au sein de la population).
C’est ce qui a été fait pour Blida et, à un degré moindre, à Alger et se fera au fur et à mesure sur tout le territoire en fonction de l’évolution des vagues épidémiques. Cette phase nécessite la mobilisation de tous les secteurs de l’offre de soins, aussi bien les établissements et les professionnels de santé publique et privée. Les questions qui vont se poser alors sont cruciales.

Comment mobiliser et adapter nos capacités (détection, protection des soignants, application des mesures de prévention, etc.) pour freiner l’épidémie et réduire le flux vers les structures de soins ? Comment réguler les moyens de prise en charge des formes sévères dans les établissements de santé ?

Les mesures d’hygiène simples sont celles qui sont les plus probantes. Le lavage fréquent des mains et le fait de rester à la maison et d’éviter les contacts lorsqu’on est malade sont probablement très utiles. Leur adoption systématique sauve de nombreuses vies.
Certes, le confinement strict, avec les mesures de prévention axées sur l’information et la communication, restent essentiels. Une vigilance devra être accordée à la disponibilité des stocks d’équipements de protection, notamment le stock étatique de masques chirurgicaux, masques FFP2, gels hydroalcooliques, réactifs et kits de dépistage.

De nombreuses voix s’élèvent pour alerter sur le manque de protection du personnel soignant dans les structures publiques. Quelle est la situation réelle dans les CHU ?

La protection des professionnels de santé en contact direct avec les patients est un enjeu stratégique pour la lutte contre cette épidémie. Si les mesures d’hygiène et de protection mentionnées dans les instructions ministérielles sont adaptées à la situation, qu’en est-il de leur mise en œuvre dans les structures sanitaires publiques et privées ?

Personnellement, je ne suis pas un soignant au sens littéral du terme et ne suis donc pas confronté au problème que vous évoquez. Je sais cependant par expérience, parce qu’ayant vécu et géré des épidémies en Algérie et ailleurs, que nous n’étions pas prêts à faire face à un risque épidémique de cette ampleur.

Les professionnels de santé en contact direct avec les patients suspects, possibles ou confirmés doivent disposer d’une formation ou d’un rappel sur la mise en œuvre des techniques d’hygiène renforcées en cas de crise sanitaire, ainsi que sur l’utilisation des moyens de protections individuelle et collective adaptés (gel hydroalcoolique, gants, masques, lunettes de protection, surblouses) en qualité et en quantité. Ce travail revient à l’unité d’hygiène hospitalière des CHU à qui l’on doit donner les moyens et l’autorité.
Cependant, je tiens à signaler que compte tenu de la perspective de circulation active au niveau national du SARS-CoV-2 et des modalités possibles de prise en charge des cas (hospitalisation complète, ambulatoire), je crains aujourd’hui qu’une bonne partie des personnels de santé de notre pays n’ont pas les informations et les moyens de protection indispensables.
C’est pourquoi il est nécessaire de réunir, au niveau des wilayas, l’ensemble des acteurs de santé (en respectant les mesures de confinement) pour partager la méthodologie et clarifier la place de chacun pour permettre de mutualiser les ressources et améliorer la réponse.

Force est de remarquer aussi que dans de nombreux quartiers, surtout là où il y a une concentration de commerces, les citoyens font preuve de manquement aux règles préventives. Qu’en pensez-vous ?

Ce que nous devons tous comprendre et faire comprendre, c’est que cette épidémie est inévitable, que le virus est parmi nous, qu’il peut être porté par n’importe lequel d’entre nous. Actuellement, il n’existe aucun vaccin ni traitement validé scientifiquement.
Les seules mesures qui permettent – et ont permis à certains pays de réduire sa propagation tels les pays asiatiques – sont les gestes simples et civiques. C’est ce qu’on appelle les mesures barrières et le confinement. C’est là un axe stratégique souvent négligé dans nos actions de prévention.

Il s’agit de changer les comportements des citoyens, de les impliquer dans cette mobilisation citoyenne pour la généralisation des mesures barrières et les soutenir dans la mise en place et le respect du confinement ; pour cela il faudrait désigner les acteurs et supports de différents domaines pour mener à bien cette importante activité. Je veux parler ici des associations, des professionnels experts, de la radio, de la télévision et particulièrement des réseaux sociaux.

Pour générer chez le citoyen ce bon comportement, le message doit être le plus simple possible et s’articulaer sur des gestes simples à la portée de tous : se laver les mains avec du savon pour rompre la chaine de transmission, ou à défaut utiliser le gel hydroalcoolique qui permet, comme le savon, de se désinfecter les mains.
La distanciation sociale est un élément-clé aussi. C’est une forme de respect mutuel par temps d’épidémie. Si tu me respectes, mets-toi à un mètre et demi de moi (la science l’a prouvé, à cette distance il y a peu de risques de contamination). Une troisième consigne concerne le salam qui suffit chez nous, pas besoin de se serrer la main ni de s’embrasser.

Au vu de la pénurie, il est cependant important de laisser la priorité des masques au personnel soignant ou aux personnes en contact avec des personnes infectées dans leur entourage proche. Il faut prévenir sur les risques des produits de contrefaçon. Tous les masques et certains gels hydroalcooliques qui circulent aujourd’hui ne sont malheureusement pas efficaces, on observe leur distribution sur les réseaux sociaux et dans les commerces.

Enfin, pour le confinement, il nous appartient à tous de le faire respecter, mais gardez en tête que l’esprit du confinement est de limiter les déplacements au strict minimum. Chaque trajet, en cette période, augmente le risque de contact et de contamination. Aussi, au-delà des règles et des risques, posez-vous la question avant chaque déplacement : est-il vraiment nécessaire ?

Tous les pays touchés par cette pandémie se retrouvent aujourd’hui face à des choix éthiques compliqués, car ils n’arrivent pas à prendre en charge tous les patients. C’est d’une grande violence pour un médecin ou un soignant de devoir faire un tri.
Nous risquons d’être dans cette situation aussi, il faut que les citoyens comprennent qu’en respectant le confinement et les gestes barrières ils sauvent les vies des personnes qui leur sont chères et ils aident les soignants dans cette période difficile.

Peut-on compter aujourd’hui sur un système de santé publique que beaucoup estiment détruit par les 20 ans de Bouteflikisme ?

Il me semble que la situation actuelle ne se prête pas à la polémique, mais à agir contre un ennemi commun à tous les Algériens et au monde : le Covid -19.
Il est regrettable de le dire, mais notre système de soins hérite d’une situation dramatique qu’a vécu notre pays des décennies durant. Aujourd’hui, nous devons faire face ensemble et utiliser toutes nos capacités. Nous disposons d’un personnel soignant compétent, dévoué, qui travaille dans des conditions souvent difficiles, qu’il faut protéger et soutenir.

Par ailleurs, nous avons aussi un réseau exceptionnel de services d’épidémiologie et de médecine préventive, des ORS et autres institutions locales et nationales sur tout le territoire national, qui peuvent relever le défi de ralentir cette épidémie si les moyens leur sont donnés. Cette épidémie est une source de grande inquiétude.
Une communication claire, compréhensible et des décisions adaptées sont des garanties pour sortir de cette crise avec le moins de risques possible.
Nous espérons qu’une fois cette crise passée, nous tirerons les leçons du passé et que dans l’Algérie nouvelle, la santé des Algériens deviendra, à travers une stratégie de santé publique multisectorielle, une priorité absolue impliquant le citoyen, le soignant et le politique.

Nouri Nesrouche

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