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Revue de presse

Modifier le sang pour faciliter les transfusions : Une avancée, pas la panacée

El Moudjahid | Algérie | 04/04/2007

L’identification de nouvelles enzymes capables d’"effacer" certaines spécificités des groupes sanguins ouvre la perspective de remédier, en partie, aux faiblesses des stocks sanguins, toujours vitaux pour les malades, mais il reste encore des années de travail et des obstacles à surmonter. Une équipe internationale réunissant Français, Américains, Suédois et Danois a identifié des nouvelles enzymes capables de transformer des globules rouges sanguins des groupes A, B et AB en globules équivalents à celui des donneurs dits "universels", c’est-à-dire ceux appartenant au groupe O.

"Si tout va bien, on pourrait disposer de ces produits dans les 3 à 5 ans", avance Bernard Henrissat du laboratoire expert en structure des enzymes du CNRS (Marseille) qui a identifié ces enzymes en collaboration avec la société américaine ZymeQuest, en évoquant d’abord des utilisations d’urgence (catastrophes, guerre...). "Il s’agit d’être extrêmement prudent", pondère toutefois ce scientifique en ajoutant qu’"on a toujours besoin de dons de sang". Le développement et la disponibilité de tels produits "pourrait demander de cinq à dix ans", estime pour sa part Neelam Dhingra de l’Organisation mondiale de la santé.

Cette possibilité de transformer des globules rouges remonte à près d’un quart de siècle. Les premiers travaux de conversion enzymatique de l’Américain Jack Goldstein, considéré comme un visionnaire, sont parus en 1982 dans la revue Science, et complétés en 1989. Mais il fallait des enzymes plus efficaces, des "bistouris" plus performants pour couper et se débarrasser des sucres présents sur les globules rouges et qui sont la marque des groupes A, B et AB, et dont sont dépourvus les globules du groupe O.

Parmi les recherches récentes, le travail paru dans le numéro d’avril de la revue Nature Biotechnology, marque une avancée. "Ils ont trouvé de nouvelles enzymes extrêmement efficaces et spécifiques, d’où l’intérêt", souligne Jean-Pierre Cartron, directeur scientifique de l’Institut national de la transfusion sanguine français (INTS). Le plus difficile était de transformer du sang A en O, celui du donneur "universel", souligne M. Cartron. Le groupe A est, avec le O, bien plus fréquent en Europe (environ à 90% à eux deux en Europe) que le B (9%) ou l’AB (2 à 3%), et donc plus intéressant à modifier. "C’est une avancée scientifique importante que l’on va suivre de très près et qui peut déboucher sur des applications dans le futur.

Mais attention, ce n’est pas la panacée", commente le docteur Bernard David, directeur médical de l’Etablissement français du sang (EFS). "Ce travail ouvre des perspectives intéressantes si le procédé devient hypersimple et hyperfiable", ajoute le docteur David. "Cela ne s’adresse qu’au groupe ABO (A, B, AB et O), certes le principal, mais il existe d’autres sous-groupes ou systèmes comme le système rhésus" qu’on doit généralement respecter sous peine d’accident, avertit ce spécialiste. "Pour les transfusions régulières en cancérologie et en hématologie, il ne faut pas penser que ce genre de globules rouges universels représentent la panacée universelle", insiste encore le docteur David. Outre les questions éventuelles de prix, "il faudra vérifier si les propriétés des globules rouges ne sont pas modifiées. Des essais préliminaires sont en cours, il faudra des essais à plus grande échelle avant de pouvoir valider leur utilisation thérapeutique", relève le docteur Cartron.

Mais si c’était le cas, on pourrait quasiment doubler les stocks de sang du groupe O et se concentrer sur les autres problèmes de transfusion, selon lui. Le docteur David rappelle aussi certains espoirs déçus : on n’a toujours pas en routine de substitut d’hémoglobine, surnommé "sang artificiel" quinze années après le lancement des premiers essais.

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