Pour ces spécialistes, les chiffres parlent d’eux-mêmes : 35 p.c de la population algérienne sont des hypertendus. Un taux des hypertendus est diabétique et plus de moitié souffrent d’obésité. Ces données ont été obtenues suite à une enquête nationale sur l’HTA et autres facteurs de risques cardiovasculaires majeurs en Algérie, réalisée par la SAHA en 2004.

Le professeur Salim Benkhedda, SG de cette société savante, a brossé jeudi matin un tableau de la situation de cette maladie en Algérie, soulignant, entre autres, les risques auxquels sont exposés les personnes souffrant de cette pathologie qualifiée par les américains de "Silent killer" (assassin silencieux). La grande partie des hypertendus algériens présente, en même temps, trois facteurs de risques (diabète, tabagisme, alcoolisme, obésité, cholestérol...), contre 10 p.c de cette population malade ayant un seul facteur de risque et 5 p.c n’ayant aucun facteur de risque.

Pour ce spécialiste, les facteurs expliquant la prévalence de cette maladie sont nombreux. En plus des traumatismes et "dégâts" causés par la situation difficile traversée par le pays durant "la décennie noire» : le stress, les mauvaises habitudes alimentaires, la sédentarité, les autres maladies auxquelles est associée l’HTA, l’obésité figurent en bonne place. Le professeur Benkhedda qualifie l’HTA de "maladie réversible" pour peu que l’on prenne les mesures de préventions et qu’on entreprenne le travail d’information et de sensibilisation, aussi bien en direction des praticiens eux-mêmes que des malades et des personnes saines. Sans ce travail, "on s’acheminerait vers une véritable hécatombe sanitaire", souligne-t-il en rappelant les complications de l’HTA et les risques cardiovasculaires qu’encourent les hypertendus, sachant que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) classe les maladies cardiovasculaires comme la première cause de mortalité dans le monde.

Cette sonnette d’alarme a été également tirée par le Professeur Merad, du service de cardiologie du CHU Mustapha d’Alger et président de la SAHA. Intervenant jeudi, devant l’assistance, pour faire une lecture des résultats de cette enquête nationale, ce spécialiste a livré quelques données concernant certaines conclusions.

Les hypertendus se concentrent surtout à l’Ouest du pays (46 p.c), où cette maladie est dépistée facilement du fait de la grande concentration de cardiologues dans cette région, contre 42 p.c à Alger (zone très touchée par les évènements de la dernière décennie), 37 p.c à l’Est, 31 p.c au Centre, 30 p.c au Sud-Est et enfin 28 % au Sud-Ouest du pays. Le professeur Merad cite également le facteur âge, les disparités régionales et le risque avéré chez la population féminine. Longtemps considérée comme une maladie touchant principalement l’homme, l’orateur a souligné que la femme est désormais aussi exposée que l’homme, notamment avec le début de la ménopause.

Il explique que 40 p.c des femmes hypertendues souffrent d’obésité, du fait qu’elles restent au foyer, du nombre élevé des accouchements et des mauvaises habitudes alimentaires. "Si on se contente de prescrire seulement des ordonnances, on aura failli à notre mission", a déclaré le Professeur Merad qui "table" essentiellement sur le travail d’information, de sensibilisation et d’une bonne prise en charge des malades.

"A quoi bon d’annoncer au patient la nature de sa maladie, s’il n’est pas pris en charge ensuite", s’interroge-t-il.
Un travail de longue haleine reste à faire, selon lui, tout comme la mise en place d’un programme national de lutte contre cette maladie. Des praticiens, rencontrés en marge de ce congrès, indiquent que seuls 7 % des hypertendus suivent un traitement à vie, après leur prise de conscience quant à la gravité de leur maladie.

Les travaux de ce 5e congrès, ouvert mercredi dans la soirée, allient la double dimension scientifique et informative. Outre des communications "pointues" sur des aspects liées à cette maladie et autres pathologies à laquelle elle est associée, la journée de jeudi a été marquée par un atelier de formation destiné aux infirmiers et aux agents paramédicaux sur les conduites à observer devant un cas d’HTA, comme les méthodes de mesure, les complications de l’HTA, la prise en charge du malade et bien d’autres aspects encore.

Les travaux de cette rencontre ont pris fin, hier, rappelle-t-on.