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El Watan | Algérie | 15/01/2007
Les chercheurs ont donc devant eux d’énormes perspectives de mettre au point des possibilités thérapeutiques pour de nombreuses maladies graves (cancers, maladies cardiovasculaires et neurodégénératives, infectiologie, diabète…). L’avenir du médicament va reposer en grande partie sur les biotechnologies. Déjà, un grand nombre de médicaments comme des vaccins ou des traitements anticancéreux notamment en sont issus. Disposer, aujourd’hui, d’un vaccin contre la maladie de parkinson ou d’Alzheimer, le SIDA, le cancer du poumon, le paludisme, les allergies alimentaires… n’est pas une réalité mais ce n’est déjà plus une utopie pour demain.
À l’origine, le gène
Dans un avenir pas très lointain, on prescrira encore un peu d’aspirine mais toutes les grandes maladies seront traitées à la « source » et spécifiquement. A ce propos et dans beaucoup de contrées, le secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, en particulier en médecine, doit d’ores et déjà repenser complètement les programmes de formation des praticiens d’un futur très proche si on ne veut pas que ces derniers soient complètement dépassés par leurs confrères sous d’autres cieux. Tout est parti de l’ADN ou acide désoxyribonucléique.
Cela a valu un prix Nobel en médecine en 1962. En effet, James Watson et Francis Crick ont découvert la structure moléculaire de cette fameuse double chaîne qui recèle tous les « secrets » de la vie. Il s’agira d’introduire, dans l’organisme malade, un gène qui sera à l’origine d’un apport d’un composé manquant comme une protéine* (exemple de l’insuline pour le diabète…) à l’origine d’une maladie, d’un blocage d’un processus à l’origine d’une maladie (cancers, maladies neurodégénératives, SIDA…) ou apporter certaines substances comme des antibiotiques directement dans des produits de consommation comme le lait.
L’intervention peut être comparée, comme chez le mécanicien automobile, à un remplacement d’une pièce de rechange défectueuse par une pièce neuve. Le médicament est entré dans une nouvelle ère, celle des biotechnologies. Un terme scientifique qui englobe une variété de techniques ayant pour point commun la manipulation des organismes vivants. En découvrant l’ADN, en élucidant sa structure, les chercheurs ont ouvert de nouvelles voies thérapeutiques. Ils arrivent à mieux comprendre le fonctionnement du corps humain ainsi que les mécanismes moléculaires des maladies. Ils savent quels sont les gènes, les protéines, les enzymes qui interviennent dans un processus pathologique et comment ces éléments interagissent.
Cette connaissance leur fournit des armes pour développer des traitements qui imitent l’arsenal défensif employé par l’organisme, en manipulant les gènes, en fabriquant des protéines, les enzymes, les anticorps et autres substances produites par notre corps pour combattre les maladies. C’est ainsi que le premier médicament issu des biotechnologies est apparu en 1984. Après avoir identifié le gène impliqué dans la production d’insuline, les chercheurs sont parvenus à reconstituer artificiellement ce processus pour produire de l’insuline « humaine ». Depuis, le produit administré aux personnes diabétiques est la réplique exacte de l’insuline fabriquée par notre organisme, et non plus de l’insuline extraite du pancréas de porc, comme c’était le cas auparavant. Ainsi, plus d’une centaine de traitements nés de ce concept, appelé « protéines recombinantes », sont aujourd’hui disponibles sur le marché. Ils traitent notamment l’anémie, les déficiences de croissance chez l’enfant (hormone de croissance), l’hémophilie… Quatre cents autres sont en phase d’étude clinique.
Les cancers
Les chercheurs agissent sur l’infiniment petit. Ils interviennent sur les gènes et les produits des gènes qui sont les protéines en les activant ou en les bloquant pour stopper le processus qui mène à une maladie. C’est le cas, par exemple, des anticorps dits « monoclonaux ». Ce sont des protéines spécifiques produites par le système immunitaire (défenses immunitaires) pour détruire les agents infectieux, que les scientifiques immunologistes ont transformés en molécules capables de cibler une cellule* (cancéreuse ou infectée) et d’agir uniquement sur elle. Leur production et leur sélection obéissent à un processus (criblage) très spécialisé. L’intérêt est évident. Car dans les traitements actuels du cancer, les produits chimiques (chimiothérapie) utilisés détruisent les cellules sans toujours faire de distinction entre celles qui sont saines et celles qui sont atteintes.
L’anticorps monoclonal est destiné, lui, à n’intervenir que sur la cellule cancéreuse. Plus de 160 traitements, actuellement en phase d’essais cliniques, sont des anticorps monoclonaux. En 2006, le prix Nobel de médecine a été attribué à Andrew Fire et Craig Mello pour, de nouveau, le domaine du transfert des gènes ou thérapie génique en particulier concernant l’ARN* ou acide ribonucléique « interférent ». L’ARN est en fait le messager de l’ADN, donc du gène. Il est un composé intermédiaire nécessaire dans la transmission des informations pour la fabrication des protéines qui sont les éléments de base de tous les processus biologiques.
En se liant avec l’ARN messager, un autre type d’ARN (l’ARN interférent) provoque la destruction de ce dernier et donc inhibe la synthèse de la protéine correspondante. Dans le cas où cette protéine est responsable d’un état pathologique, le blocage de sa fabrication peut présenter un grand intérêt thérapeutique. Les premiers médicaments issus de cette nouvelle approche génique pourraient être disponibles d’ici cinq à dix ans pour le traitement de cancers et d’infections virales.
Maladies neurodégénératives
Une des perspectives thérapeutiques les plus enthousiasmantes aujourd’hui à l’étude est la manipulation pharmacologique in situ (dans l’organe cible) ou pharmacogénétique des propres cellules souches d’un individu. Certains facteurs arrivent à stimuler la multiplication des cellules souches du cerveau en vue de guérir les maladies neurodégénératives. C’est une possibilité à long terme. On pourrait presque parler de la pilule de la jouvence puisque le but est de déclencher, avec de tels composés, la production de tissus venant remplacer ceux malades ou altérés. Ainsi, une équipe de chercheurs a découvert qu’une partie du mécanisme d’action des antidépresseurs passait par la stimulation et la multiplication de cellules souches au niveau du cerveau des individus traités.
Cette nouvelle approche thérapeutique n’est donc pas un rêve inaccessible, c’est une réalité potentielle. Actuellement en ce qui concerne la maladie de Parkinson, les armes contre la maladie sont représentées par des médicaments et des électrodes. Puisque la maladie résulte d’un déficit d’un neurotransmetteur appelé dopamine, il suffit d’en fournir au malade. La dopamine en tant que telle, sous forme de médicament, n’arrive pas jusqu’au cerveau. Par contre, l’administration d’un précurseur de la dopamine se traduit par un acheminement jusqu’aux cellules nerveuses qui le transforment en dopamine. Les résultats, quoique réels, ne sont pas toujours à la hauteur souhaitée par le patient.
C’est pourquoi le professeur Alim-Louis Benabid du CHU de Grenoble (France) a mis au point la méthode dite « stimulation intracérébrale profonde ». Elle est réalisée par une implantation, dans un noyau du cerveau, d’électrodes alimentées par un courant électrique. Une telle stimulation contrôlée se traduit par une inhibition des tremblements chez le patient. Cette intervention, très minutieuse, est réalisée avec l’aide d’un robot qui indiquera au chirurgien, précisément, l’endroit exact de l’implantation de l’électrode. Ainsi, le patient, sous simple anesthésie locale, va participer lui aussi par sa collaboration à une mise en place adaptée du matériel implanté et l’observation in situ de l’effet de cette stimulation profonde.
En attendant demain...casser un tabou avec les médicaments génériques
Le médicament générique*, à côté du médicament original (médicament princeps*), a pleinement sa place dans l’arsenal thérapeutique, dès l’instant où les brevets ont expiré. Sur le plan scientifique, il a exactement la même composition chimique que le médicament d’origine (même quantité de principe actif et même forme pharmaceutique) et a subi, au cours de sa fabrication, les mêmes contrôles (bioéquivalence) que le médicament d’origine. Tout le monde en convient. De plus, il s’agit d’un outil de régulation et d’économie des coûts même si la santé n’a pas de « prix ». Il serait intéressant que le lecteur sache le processus de l’élaboration d’un médicament générique à partir du médicament original.
Lexique
L’auteur est Directeur de recherches Service d’immunologie des transplantations et des déficits immunitaires, Pavillon P, Hôpital E. Herriot, Lyon, France, E-mail : sanhadji@sante.univ-lyon1.fr
Kamel Sanhadji
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