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Revue de presse

Produire le médicament en Algérie, un enjeu majeur de santé publique

El Watan | Algérie | 12/07/2015

Aux yeux du professionnel de la santé publique, dans notre pays, le débat public autour de la politique nationale du médicament est souvent surprenant et a même quelque chose de schizophrénique. Au cours des dernières années, la presse nationale ne manquait jamais de se faire l’écho et de s’émouvoir, à juste titre sans doute, des dysfonctionnements de l’approvisionnement en produits pharmaceutiques au niveau des établissements de santé ou des officines. Mais, dans le même temps, cette même presse se plaisait à pointer du doigt, à longueur d’année et à chaque fois que les douanes algériennes rendaient publiques les statistiques d’évolution de notre commerce extérieur, l’augmentation de la facture des importations de médicaments.

Et puis, avec les premiers mois de cette année 2015, la facture des importations de médicaments a, comme par enchantement, commencé à baisser. Au moment où chacun commençait à se féliciter de cette issue miraculeuse, voilà que refleurissent une nouvelle fois les nouvelles de rupture graves dans l’approvisionnement de nos malades en produits de santé.

Entre-temps, personne n’avait prêté de réelle attention aux nombreuses mises en garde émises par des institutions comme l’Union Nationale des Opérateurs de la Pharmacie (UNOP) ou le Syndicat National des Pharmaciens d’Officine (SNAPO) qui alertaient sur les retards de délivrance des autorisations d’importation et sur les inévitables conséquences que cela provoquerait pour les patients.

Il ne s’agit pas ici de culpabiliser les médias nationaux, pas plus qu’il ne s’agit de prendre à partie les autorités publiques ou les autres acteurs, nombreux, qui interviennent dans la chaîne complexe de la production, de l’importation ou de la distribution du médicament.

A y regarder de près, chacun semble faire son travail de son côté du mieux qu’il peut et selon les contraintes qui sont les siennes, mais sans que personne ne se préoccupe de la cohérence de l’ensemble.

Le ministère de la santé semble pris en tenaille entre son désir d’assurer la fluidité du marché, la disponibilité des produits en qualité et en quantités requises, l’encouragement de la production nationale et la régulation de l’activité pharmaceutique, le tout avec les plus bas prix possibles, garantissant à la fois l’accessibilité du médicament et l’équilibre précaire des caisses de sécurité sociale.

Autant dire qu’il est chargé de résoudre une équation insoluble avec des moyens dérisoires.

Les producteurs, qui ont accompli des progrès sérieux et qui ont arraché jusqu’à plus de 40% de parts de marché, se débattent face aux incohérences d’un environnement économique et juridique national dont chacun sait qu’il privilégie les facilités de l’acte d’importation et du gain rapide et facile.

Les distributeurs, quant à eux, doivent faire face aux aléas quotidiens du marché et des protestations légitimes de leur clientèle, alors qu’ils sont eux-mêmes sous la pression d’un système d’approvisionnement trop souvent versatile ; ils doivent se débrouiller pour assurer l’acheminement de produits fragiles et périssables sur un territoire immense, avec des marges rigides et figées en valeurs absolues, qui couvrent de plus en plus mal leurs coûts sujets à une inflation incompressible, du fait notamment des augmentations salariales et de la majorité des charges. Ce sont eux qui, à coup sûr, accomplissent les tâches sans même avoir droit à la reconnaissance qui leur est due : ce sont les bêtes de somme de toute la filière du médicament.

Et, plus grave, le seul acteur qui se retrouve écrasé totalement par cette machinerie complexe, celui dont les intérêts sont toujours sacrifiés, c’est le patient. C’est lui, en définitive, qui « essuie les plâtres » à chaque fois qu’un grain de sable quelconque vient perturber ce système d’organisation difforme et qui peut être assimilé à un monstre sans tête. Alors que ce même patient est censé être la seule et l’unique finalité de toute cette organisation bureaucratique sophistiquée, il se retrouve dans les faits systématiquement marginalisé.

Il peut se débattre autant qu’il peut, il est rarement entendu, puisque, c’est bien connu, le malade n’est pas, par définition, en mesure de manifester sa colère et qu’il n’a pas le loisir de couper des routes pour faire valoir son droit. Son ultime recours semble être, aujourd’hui, celui des cris de détresse auxquels la presse nationale finit par donner quelque écho, quand les tensions se font insoutenables.

Et c’est ainsi que se crée ce paradoxe saisissant qui veut que, alors même que les autorités publiques ont injecté des sommes colossales dans le système de soins, beaucoup plus que par le passé, notre mode de gestion est tel qu’il engendre encore plus d’insatisfactions et plus de ressentiments que jamais.

Ce paradoxe témoigne avant tout d’une absence de vision d’ensemble du marché du médicament et des voies et moyens aptes à assurer son développement et sa promotion. Il est symptomatique, à cet égard, que cette agence nationale du médicament, pourtant créée officiellement par un texte de loi depuis 2008, n’arrive toujours pas à être mise sur pied sept années plus tard. Derrière cette insuffisance de vision, il y a, à mon humble avis, deux tares fondamentales qui nous empêchent d’avancer.

La première tare, sans doute la plus problématique, est celle du coût des soins et, en bout de course, la finalité d’une politique de santé publique. On le voit très bien avec le cas du médicament : tout le monde admet qu’il faut améliorer la disponibilité du produit pharmaceutique, mais chacun s’offusque d’une facture d’importation qui augmente. C’est ainsi que les 2,6 Mds de dollars US d’importations annuelles de produits pharmaceutiques font couler nettement plus d’encre que l’importation de 7 Mds de dollars US de véhicules ou de 4 Mds de dollars US de carburants.

Qui parle des 2,4 Mds dollars US de tabac consommés chaque année ? Comprenne qui peut. En fait, il convient de se prononcer sur ce qui est avant tout une question d’éthique. La santé a certes un coût qui peut paraître élevé, mais il ne faut jamais perdre de vue que c’est d’abord un investissement et pas seulement une dépense. Une population bien soignée est une population plus productive et ce n’est pas un hasard si les pays les plus développés sont d’abord ceux qui investissent le plus dans leur système de santé.

Et, à cet égard, le fait de focaliser sur l’augmentation des importations de médicaments est un peu comme l’arbre qui cache la forêt : l’effort exceptionnel fourni au cours des dernières années a conduit à augmenter sensiblement la consommation de médicaments, la faisant passer de 60 dollars US/habitant en 2008, à près de 100 dollars US en 2014 ; mais, pour remarquable que soit cette progression, notre pays reste toujours en deçà de la moyenne mondiale qui se situe autour de 130 dollars US/habitant. Notre pays a donc encore des progrès à accomplir de ce point de vue. Et surtout, pour qui veut se donner la peine d’observer les détails, l’accroissement de nos importations s’explique aisément par la transition épidémiologique et démographique.

Ainsi, en décidant d’un Plan Cancer ambitieux, sous l’impulsion directe du président de la République, les pouvoirs publics avaient manifesté clairement leur volonté de répondre aux besoins croissants de la population en soins de qualité. A l’évidence, on ne peut que s’en féliciter. Mais, il faut bien souligner que les nouvelles thérapies du traitement du cancer ont un coût très élevé, elles mobilisent des montants financiers qui sont passés de 100 millions DA en 2005 à 14 milliards DA en 2012, et doivent, pour l’essentiel, être importées.

Les thérapies ciblées représentent 63% de l’enveloppe allouée au traitement anticancéreux et 33% du budget des médicaments hospitaliers. Il n’y a pas de doute, par ailleurs, que l’engagement fort qui vient d’être pris en faveur d’un dépistage précoce va se traduire, pour les cinq années à venir, par un accroissement sensible du nombre des malades à traiter et donc, inévitablement, de la demande future en produits pharmaceutiques importés.

Ce raisonnement vaut bien sûr pour le traitement du cancer tout comme pour un grand nombre d’autres classes thérapeutiques. Les projections faites par le très sérieux IMS Health évaluent la demande nationale globale en médicaments à l’horizon 2018 autour de 5,7 Mds de dollars US. Dès lors, et comme chacun peut aisément le comprendre, le véritable enjeu, qui est tout autant sanitaire qu’économique, est celui de savoir quelle sera la part de l’importation et celle de la fabrication nationale.

C’est un enjeu d’autant plus décisif que toutes les analyses de la conjoncture économique qui prévaudra au cours des prochaines années sont loin d’être rassurantes : quand bien même les marchés pétroliers mondiaux, si importants pour notre pays, viendraient à se stabiliser, de grands défis attendent l’économie nationale. La réponse aux besoins de santé de la population sera d’autant plus assurée et garantie qu’elle sera adossée de plus en plus aux performances de la production nationale. Et la question de l’appui à apporter au développement de la production est précisément la deuxième tare qui affecte l’organisation et le développement de notre marché du médicament.

Disons-le tout de suite, la situation est loin d’être si désastreuse que cela. Après tout, de tout le secteur industriel national, la filière pharmaceutique est celle qui a enregistré les taux de croissance les plus solides, en moyenne de 17% par an depuis l’année 2006. C’est aussi l’une des rares filières qui a pu gagner en parts de marché par rapport à l’importation, grâce aux mesures courageuses de restrictions aux importations de produits fabriqués localement, prises par le gouvernement en 2008. En l’espace des dix dernières années, la part de la production nationale dans la satisfaction des besoins en médicaments est passée de 12% à 41%.

L’investissement dans l’industrie pharmaceutique est impressionnant si l’on en juge par les 151 projets agréés par le ministère de la santé. Pour nous autres, fabricants engagés dans la production, il est difficile de comprendre pourquoi, avec un écosystème si favorable, nos responsables affichent si peu d’enthousiasme et si peu d’ambition. Il est vrai que, comme partout, les problèmes sont tenaces. A commencer par cette bureaucratie sous laquelle continue d’étouffer notre système d’enregistrement, véritable colonne vertébrale de toute politique pharmaceutique. Une simple opération d’enregistrement finit par traîner plusieurs mois.

Comme toujours en pareil cas, ce sont souvent quelques techniciens qui sont cloués au pilori alors que la vraie raison, connue de tous, tient à la totale inadéquation entre les moyens humains et matériels mobilisés et l’étendue de la charge de travail qui doit être accomplie au quotidien. Ou alors cette incapacité à édicter une réglementation appropriée sur le recours aux bio-similaires, devenue une voie de nécessité permettant de donner un signal positif aux investisseurs pour assurer l’accès élargi des Algériens aux thérapies modernes.

C’est là une défaillance préjudiciable à plusieurs titres, dans la mesure où le développement des bio-similaires constitue la solution la plus appropriée pour réaliser des économies en devises substantielles tout en proposant des médicaments innovants et en attirant sur le marché national des laboratoires internationaux d’envergure. Au lieu de quoi, la dernière négociation des prix qui a été menée à la hussarde, sans même discerner par une discrimination favorable entre ceux qui se sont impliqués dans la production localement et ceux qui nous considèrent simplement comme un marché.

Le ministère de la Santé a focalisé tardivement et maladroitement sur une question économique certes légitime, mais qui a été vécue par nombre de laboratoires internationaux comme une forme de sanction malvenue. Il y a encore ces inutiles rigidités du système régissant le prix du médicament, comme ces allées et venues incessantes entre décision d’enregistrement et décision de remboursement.

Ou enfin l’absence de réponse structurée aux besoins immenses en formations de ressources humaines spécialisées, pour donner toutes ses chances de succès au boom actuel de l’investissement pharmaceutique dans notre pays. On pourrait penser, dans un premier temps, que tous ces problèmes relèvent des insuffisances habituelles de nos administrations et que donc, comme tous les producteurs de ce pays, nous prenons notre part du fardeau que nous impose une bureaucratie nationale omnipotente.

Mais, à la réflexion, nous ne pouvons-nous empêcher de nous demander si notre filière n’est pas précisément ciblée en raison de ses succès. On pourrait être ici accusés de céder à une forme de paranoïa, mais c’est aussi pour nous une façon de faire état de difficultés difficiles à comprendre, tellement les obstacles au développement d’un secteur que tout le monde dit encourager d’un côté se retrouve de l’autre à ployer sous le poids d’obstacles difficilement justifiables.

Le médicament est bien, au sein de notre économie, le seul produit à avoir enregistré des baisses régulières de ses prix au cours des dernières années, là où l’ensemble des autres produits ont connu des hausses sensibles, en ne faisant après tout que répercuter à la vente l’inflation des coûts de fabrication. Une telle pratique, qui relève du bon sens économique, est non seulement interdite pour le fabricant de médicament, mais l’administration fait pression sur lui pour qu’il abaisse ses prix, soi-disant pour contribuer à l’équilibre des caisses de sécurité sociale.

Voilà un noble objectif, il est vrai, mais nos responsables tirent un peu trop sur la ficelle : ils oublient un peu vite que ce sont les producteurs nationaux qui ont permis l’installation du système des tarifs de référence. Ce sont eux qui ont déjà permis de tirer les prix à la baisse et leur demander davantage ce serait tout bonnement les condamner. Il est vrai que cela est beaucoup plus facile que de taxer davantage les produits tabagiques qui sont pourtant un problème majeur de santé publique.

Ou, encore moins hasardeux il est vrai, que d’aller chercher de la ressource auprès de toutes ces activités informelles qui narguent ouvertement notre Etat. Dans le même esprit, qui s’interroge vraiment sur le fait que nos pharmaciens d’officine, qui sont les auxiliaires précieux de toute politique de santé publique, voient leurs revenus s’éroder d’année en année du fait d’un système de prix qui écrase chaque fois un peu plus les marges étroites qui leur sont consenties ?

Cet acteur-clef de notre filière a subi sans broncher, des années durant, des pertes conséquentes de chiffres d’affaires par suite de la mise en place des tarifs de référence, d’une politique de promotion du générique ou des baisses de prix imposées par l’autorité publique aux producteurs nationaux comme aux fournisseurs étrangers. Et, dans un contexte où ses charges s’alourdissent du fait de l’inflation, tout le monde semble trouver normal de ne lui accorder aucune révision de ses marges commerciales réglementaires.

Toutes ces remarques conduisent au même constat, à savoir que l’encouragement au développement de la production nationale du médicament en est toujours au stade du discours. Et aujourd’hui, faute d’une volonté politique réelle et qui soit appliquée sans ambages sur le terrain, le producteur pharmaceutique, d’un côté, tout autant que le patient à l’autre bout de la chaîne, continueront d’être les véritables maillons faibles de la politique nationale du médicament.

Dans un contexte global où les effets néfastes des soubresauts de l’économie mondiale peuvent s’avérer dévastateurs, prendre à bras le corps ces contraintes est un enjeu économique et social de premier plan. Et c’est, par-dessus tout, un enjeu vital pour l’efficacité de la politique nationale de santé publique au cours des prochaines années.

Abdelouahed Kerrar

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