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El Watan | Algérie | 04/03/2012
L’Algérie enregistre près de 40 000 nouveaux cas de cancer toutes localisations confondues. La radiothérapie constitue un des moyens de traitement. Comment, d’après-vous, doit-on organiser ces soins ?
Les soins spécialisés en oncologie (radio-oncologie, oncologie médicale, chirurgie oncologique…) doivent être prodigués dans des structures multidisciplinaires bien établies, soit au sein d’un centre anticancéreux soit dans un réseau oncologique formel, par exemple dans un CHU ou un hôpital régional public ou privé. De telles structures existent en Algérie, mais leur nombre et leur capacité sont largement insuffisants, et toutes les spécialités ne sont pas toujours représentées. La multiplication de ces structures et leur répartition judicieuse, en fonction de la densité de la population et de la situation géographique des zones éloignées, peuvent garantir une prise en charge optimale des patients atteints d’un cancer.
Sur les 28 000 cancéreux nécessitant une radiothérapie, seuls 8000 sont pris en charge en raison du manque de structures spécialisées. Est-ce que les malades ont la chance de survivre à leur maladie sachant que les rendez-vous sont fixés à plus de six mois après le diagnostic ?
Ces chiffres, s’ils sont vérifiés, sont tout simplement inacceptables dans une Algérie moderne. Avec une telle prise en charge, pour certains cancers, les patients n’auront que peu ou pas de chance de survivre.
La radiothérapie au cobalt est actuellement utilisée pour traiter les malades algériens. Y a-t-il des risques pour ces patients ?
La cobaltothérapie standard a pratiquement disparu du paysage de la radiothérapie moderne. En effet, depuis quelques décennies, dans les pays développés, ces appareils ont graduellement été remplacés par des accélérateurs d’électrons qui se caractérisent par une meilleure distribution de dose (soit moins d’effets secondaires), plus de possibilités thérapeutiques et moins de problèmes de radioprotection. Il n’empêche pas moins que ces appareils continuent à rendre service dans les pays en voie de développement ou pauvres aux ressources limitées. Je ne pense pas que l’Algérie fasse partie de cette dernière catégorie pour justifier un investissement en cobaltothérapie conventionnelle. Bien que les patients traités au cobalt ne courent pas de risque démesuré si la technique et les indications sont optimisées, cette thérapie reste inadaptée pour beaucoup de localisations tumorales, et, globalement, les patients seront certainement mieux traités par un accélérateur.
Que prévoient les recommandations internationales ?
Il n’y a pas de recommandations claires à ce sujet, et ces dernières peuvent être résumées par l’utilisation de rayonnements de haute énergie (soit le type d’appareil) les plus adéquats à disposition. Les accélérateurs de nouvelle génération permettent l’utilisation des techniques de pointe telles que la radiothérapie par modulation d’intensité guidée par l’imagerie qui est devenue un standard pour plusieurs localisations tumorales que les appareils de cobalt conventionnels ne peuvent offrir.
L’Algérie prévoit l’acquisition de 57 accélérateurs pour les années prochaines. Est-ce que cela sera suffisant pour répondre à la demande ?
C’est une bonne nouvelle pour les patients algériens, pourvu que leur déploiement soit le plus rapide possible. En effet, ce projet date d’il y a déjà quelques années. Le nombre d’accélérateurs annoncés, combiné avec ceux déjà en fonction permet d’espérer un ratio d’un accélérateur par 600 000 habitants, ce qui constitue un bon minimum qui va améliorer la prise en charge des patients de façon considérable.
Pensez-vous que le problème sera définitivement réglé ?
En matière de santé, et particulièrement d’oncologie, tous les problèmes ne peuvent être réglés définitivement, car le domaine est très évolutif. En effet, le nombre de nouveaux cancers n’est pas statique, les techniques de traitement sont en continuelle évolution et la demande aussi. Par ailleurs, les besoins en soins et les exigences de demain ne seront pas les mêmes que ceux d’aujourd’hui. Hormis les potentielles difficultés pour trouver le personnel spécialisé, le problème qui guette un tel parc d’accélérateurs et celui de la maintenance des appareils durant les années à venir. Cette dernière doit être assurée selon les standards actuels, afin d’éviter l’impact négatif des pannes prolongées ou répétitives sur la réussite du traitement et l’incertitude sur sa délivrance au quotidien.
Un chercheur de renommée internationale
L’université de Genève a conféré le titre de professeur associé Dr Abdelkrim S. Allal le 1er août 2009. Ce titre est la plus haute distinction que l’université de Genève peut remettre à des médecins exerçant leur activité principale en dehors des hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Cette nomination par l’université de Genève est en lien direct avec l’enseignement dispensé depuis des années par le Dr Allal et ses vastes travaux de recherche en radio-oncologie (radiothérapie des maladies cancéreuses).
Le Dr Allal s’est engagé dans la recherche clinique et fondamentale, particulièrement dans le domaine des cancers ORL (oto-rhino-laryngologie) et du système digestif. Il a publié près de 100 articles dans des journaux à politique éditoriale et présenté une centaine d’exposés lors de congrès nationaux et internationaux. Parallèlement, il a participé et dirigé plusieurs projets de recherche, notamment ceux du Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS), dont deux sont en cours, en collaboration avec l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne et les HUG.
Il a acquis des connaissances approfondies en radio-oncologie au cours de ses longues années de pratique aux HUG, où il a exercé pendant 16 ans au service de radio-oncologie, en dernier lieu comme chef de service adjoint. Citoyen suisse et algérien, Dr Allal a obtenu son titre de docteur en 1985 à la faculté de médecine de l’Institut des sciences médicales d’Oran en Algérie. Il a ensuite poursuivi ses études de spécialisation en Belgique, en France et en Suisse et est titulaire du diplôme FMH de radio-oncologie.
Outre son activité en qualité de radio-oncologue à l’HFR, il est médecin consultant aux HUG et a une charge de cours à l’université de Genève. Par ailleurs, le Dr Allal fait partie de nombreuses commissions scientifiques et est vice-président de la Société suisse de radio-oncologie (SRO).
Djamila Kourta
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