C’est d’ailleurs ce qui la rend si dangereuse et pernicieuse, alerte le Professeur Ahcène Chibane, du service de médecine interne, de l’hôpital Aïn Taya et membre de la Société algérienne de l’hypertension artérielle (Saha). «Il existe encore beaucoup trop d’hypertendus qui s’ignorent et ne savent rien de cette menace insidieuse», s’alarme-t-il. Selon lui, 50% des hypertendus ignorent leur état, ce qui les expose à de graves risques cardiovasculaires. D’où l’importance du dépistage et l’intérêt de prévenir les facteurs de risque, notamment l’obésité, la sédentarité, la malbouffe, le tabagisme, l’alcool…

Selon ce spécialiste, la prévalence de l’HTA augmente de façon inquiétante en Algérie et touche de plus en plus d’Algériens, notamment les jeunes. Selon une enquête nationale réalisée en 2004 par la Saha dans 11 wilayas du pays, «35,3% des sujets qui dépassent l’âge de 20 ans sont atteints d’HTA», dit-il. «L’étude Tahina dévoile, pour sa part, que 26% de la population souffre de cette pathologie», ajoute notre interlocuteur. Le Pr Ahcène Chibane précise également qu’une étude réalisée à l’hôpital de Aïn Taya, sur 1500 employés, a démontré que 37,2% d’entre eux sont touchés par l’HTA».

Ainsi, les chiffres avancés se rejoignent. D’après les différentes enquêtes, «en moyenne, plus du tiers des Algériens adultes sont hypertendus», nous affirme ce spécialiste. Au banc des accusés, une alimentation hypercalorique riche en graisses avec un excès de sel qui favorisent l’apparition de cette maladie chronique. Les produits industriels qui nuisent énormément à notre santé sont également montrés du doigt. Le Pr Chibane estime que le changement des habitudes alimentaires des Algériens a porté un réel préjudice à leur santé et donné lieu à l’émergence de certaines maladies comme l’HTA.

Les Algériens ont troqué les bons plats traditionnels contre la restauration rapide à l’exemple des pizzas, chawarma et autres sandwichs, véritables ennemis de notre santé car ils contiennent trop de calories, de graisses et de sel. Il met en garde contre la consommation excessive de sel estimant qu’une réduction de sa consommation aurait un effet bénéfique sur la santé. Selon lui, «il est recommandé de ne pas dépasser les 6 grammes par jour». Il explique que certains pays comme la France ont pris des initiatives dans ce sens pour réduire la consommation journalière en sel, en lançant des programmes. «Ils ont notamment réussi à diminuer sensiblement la teneur du sel dans le pain». L’’Organisation mondiale de la santé (OMS) a appelé à une réduction de la consommation journalière en sel vu son impact sur la santé et en particulier sur l’HTA et les maladies cardiovasculaires. L’objectif est d’atteindre une consommation de 5 grammes par jour. S’agissant de la prise en charge des hypertendus au niveau national, il dira qu’«il y a tout un arsenal thérapeutique en Algérie» et que, pratiquement, tous les médicaments sont disponibles». Il a, par ailleurs, insisté sur la nécessité d’adopter un mode de vie sain, de manger équilibré en privilégiant les fruits et légumes et en limitant les apports en sel, de pratiquer du sport et de bannir le tabagisme. Il est impératif de faire contrôler régulièrement sa tension artérielle pour que cette maladie à grand risque ne passe pas inaperçue.

Par Amel Bouakba