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Algérie A propos de l’éthique médicale (3ème partie et fin)

El Watan | Algérie | 12/12/2006 | Lire l'article original

La sophistication de la médecine a secrété un autre effet pervers. Elle a dévitalisé l’acte médical qui est devenu inquiétant et parfois agressif. C’est pourquoi dans les pays occidentaux les sujets ont, de plus en plus, recours aux médecines dites douces (homéopathie,...). En outre, l’individualisme et le manque de spiritualité qui caractérisent ces sociétés amènent les individus à se tourner vers les médecines orientales (chinoise, indienne, etc.) pour leur caractère étrange et fascinant mais surtout pour leur philosophie communautariste et spiritualiste.

Dans notre pays, la religion a une place importante dans la vie des sujets. Ces derniers sont aussi pétris de mysticisme, de superstition et de magie. Le recours aux imams, talebs et autres guérisseurs, « dépositaires d’un pouvoir surnaturel ou divin », est la règle en particulier quand il s’agit de symptômes psychiques bruyants et interprétés comme étant un signe d’influence ou de malveillance extérieure : sorcellerie, djinns, etc. La folie n’est pas acceptée, elle fait peur. C’est pourquoi le sujet s’adresse d’abord à la « médecine » traditionnelle qui est d’ailleurs encouragée et validée par le groupe familial et social. La consultation chez le médecin survient généralement après l’échec de ces pratiques.

Cette démarche peut dans de nombreux cas être opérante et apporter un soulagement, toujours momentané, au sujet et à sa famille. Le recours aux médecines dites traditionnelles fait partie de notre environnement socioculturel et religieux. Chacun de nous a besoin de nourrir la certitude de guérir par l’hypothétique intervention de quelque chose de l’ordre du magique et du surnaturel pour certains et de l’ordre du divin pour d’autres. Grâce à cela, une disposition psychologique particulière inscrit l’individu dans l’amorce d’un mouvement, d’une dynamique vers la guérison...

La levée du symptôme survient. Les médecines orientales douces, empiriques mais expérimentées – à l’exemple de celles inspirées du yoga ou de l’acupuncture – se parent toujours d’un peu de mystère et d’étrange pour suggérer puis immiscer discrètement dans l’esprit du sujet malade cette possible intervention « occulte ». Les talebs et les imams, qui officient dans notre société font appel à leur érudition religieuse pour exercer leur activité. Le charisme dont certains bénéficient dans la cité, dans la région et quelquefois à travers tout le pays, suffit à exercer une influence sur la vie psychique du sujet dont l’esprit se dispose à recevoir le soin. La roqia, qui est devenue depuis ces dernières années la pratique la plus courante, exerce cette influence. La roqia consiste à faire des prières à Dieu (la daâwa) pour que celui-ci soulage la souffrance et apporte la guérison. Ces prières sont accompagnées par un homme de culte, un imam ou un taleb, qui lit des versets du Coran adaptés à la nécessité. Dans la religion chrétienne, ce rôle est dévolu au curé ou au prêtre.

L’usage de l’eau, sur laquelle des versets coraniques sont lus, constitue le médiateur nécessaire à l’accomplissement de la guérison. L’eau devient bénite et jouit alors de vertus thérapeutiques. La prière adressée à Dieu s’inscrit dans les convictions et la foi profonde du sujet. Dans la souffrance, la ferveur est multipliée. Tant mieux, car la disposition psychologique à la guérison est amorcée. Des données récentes, de plus en plus nombreuses, soutiennent, il est vrai, l’hypothèse d’une action modulatrice de la vie psychique sur les fonctions biologiques. Et c’est précisément dans cette interface « obscure » du dialogue entre le corps et l’esprit que vient s’inscrire « l’effet psychologique » et par conséquent l’efficacité toute relative, il faut le dire, des pratiques religieuses, des médecines douces parallèles mais aussi des médecines traditionnelles. Originellement empiriques, ces pratiques bénéficient aujourd’hui d’un apport scientifique certain qui lève progressivement le voile sur leur mode d’action et sur les raisons de leur efficacité.

Cependant, elles gagneraient plus en crédit si elles acceptaient de se départir de leurs oripeaux mystiques, si elles offraient plus de transparence et si elles permettaient un regard critique sur leurs activités. Le recours aux pratiques traditionnelles participe du libre arbitre du malade. Contrarier ce choix est une entrave à sa liberté. Et venant d’un médecin, c’est une erreur d’éthique. Empêcher le sujet en souffrance de vivre cette expérience singulière constitue, à mon avis, une mutilation psychique. Il est toutefois du devoir du médecin d’informer et d’éclairer son malade sur les risques qu’il présente à se détourner de la médecine moderne et à recourir à de telles pratiques. « Le médecin, le chirurgien-dentiste doit s’efforcer d’éclairer son malade par une information intelligible et loyale sur les raisons de tout acte médical » (article 43, paragraphe 3, devoirs envers les malades). Il appartient également au médecin d’offrir les conditions psychologiques propices à l’émergence de la guérison.

Ce dernier (le médecin) doit puiser dans sa compétence scientifique et dans la « magie » de la complicité de sa relation avec son malade, cette alchimie particulière qui fait de la médecine un art, l’art de guérir. Faut-il pour autant encourager le choix du recours aux pratiques traditionnelles ? Non est ma conviction, car aucune pratique traditionnelle et/ou médecine parallèle ne peut remplacer l’acte médical. Néanmoins, plusieurs médecins incitent et trop souvent exhortent les malades à recourir à de telles pratiques. Ce comportement, que doit s’interdire le praticien, comme le recommande le code algérien de déontologie médicale (article 19, paragraphe 1, devoirs généraux), déconsidère la profession médicale et constitue une faute professionnelle et une entorse à l’éthique et à la déontologie. Se défausser sur un taleb ou un imam pour masquer son incompétence est de plus inacceptable.

Après lui avoir fait subir une multitude d’examens coûteux et inutiles, un confrère a dit à ce malade : « Vous n’avez rien, vous devriez aller voir un taleb. » Le sujet qui nous rapporte cela n’avait rien en effet qui pouvait apparaître dans les examens radiologiques pratiqués. Et pour cause, il présentait des troubles anxieux évidents. Dans son article 45 (paragraphe 3, devoirs envers le malade), le code de déontologie médical stipule « dès lors qu’il a accepté de répondre à une demande, le médecin, le chirurgien-dentiste, s’engage à assurer à ses malades des soins consciencieux, dévoués, conformes aux données récentes de la science et de faire appel, s’il y a lieu, à l’aide de confrères compétents et qualifiés ». Est-ce que le taleb et l’imam font partie du corps médical ? Est-ce qu’ils peuvent être considérés comme des confrères, compétents et qualifiés de surcroît ? Est-ce que ces pratiques ont donné la preuve scientifique de leur efficacité ? Nul doute que ce n’est pas le cas.

Dans l’article 31 (paragraphe 1, devoirs généraux) il est dit : « Le médecin, le chirurgien-dentiste ne peut proposer à ses malades ou à leur entourage comme salutaire ou sans danger, un remède ou un procédé illusoire ou insuffisamment éprouvé. Toute pratique de charlatanisme leur est interdite. » Pour autant, de telles situations sont fréquentes. Elles ont été, maintes fois, rapportées par les malades. Se débarrasser ou se décharger du malade de cette façon est d’autant plus inacceptable quand cet agissement participe d’une stratégie mue par des considérations strictement financières, politiques et/ou religieuses. Ces dernières obscurcissent toujours la clairvoyance du médecin.

Le consensus diagnostic et le soin se heurtent dans tous les cas – concernant les troubles psychiques notamment – aux convictions et croyances qui servent de références théoriques et guident l’acte thérapeutique. Le médecin n’est plus dans son rôle, il renonce à sa mission qu’il soumet totalement à ses convictions. Cela constitue une infraction à l’éthique médicale. « Le médecin et le chirurgien-dentiste ne peuvent aliéner leur indépendance professionnelle sous quelque forme que ce soit » (article 10, paragraphe 1, devoirs généraux). La religion prend, particulièrement aujourd’hui, une place importante dans la vie de chacun. Ce qui, en soit, est une affaire personnelle.

Y emprisonner le malade sous ce prétexte ne constitue pas, à mon sens, une erreur mais une faute médicale grave. Le sujet qui souffre est vulnérable et demande l’aide. Il peut, à ce titre, être abusé et être victime d’une dérive spiritualiste et d’une confusion volontaire et/ou malveillante – dans sa prise en charge – des réponses scientifiques et idéologiques. Le médecin doit apporter une réponse scientifique et la réponse idéologique n’est pas dans ses compétences. L’article 43 du code de déontologie (cité plus haut) invite le médecin, et il n’est pas inutile de le rappeler, à éclairer et informer de façon intelligible son malade. Est-ce ici le cas ? Les dégâts occasionnés par de telles pratiques sont souvent considérables. Les nombreux exemples rapportés régulièrement par les quotidiens d’information en témoignent (le Soir d’Algérie du 2 octobre 2006). C’est pour cela que le ministère des Affaires religieuses vient de proclamer une fetwa pour interdire la pratique de la roqia et de la hidjama dans les mosquées (journal Liberté du 21 octobre 2006). Faut-il s’en féliciter ? Sans doute. Mais est-ce qu’une fetwa suffit pour arrêter les dérives constatées à l’occasion de ces pratiques ? Et il est par ailleurs légitime de s’interroger sur le silence, à ce sujet, dans lequel s’est emmuré le ministère de la Santé publique.

Des tentatives de soumission de la volonté du malade sont également observées. Certains talebs et imams, heureusement peu nombreux il faut le dire, se comportent en véritables gourous et interdisent au malade de consulter notamment en psychiatrie et de prendre des traitements médicamenteux. La volonté de soumettre le sujet participe ici d’une stratégie qui vise à exercer une influence sur sa vie spirituelle et religieuse. Cette dérive professionnelle et éthique met en danger non seulement la santé mais aussi la liberté du malade. Cette « mainmise » sur ce dernier (le malade), qui souffre et qui est vulnérable, est rendue possible, nous le disions, grâce à la complicité de certains de nos confrères. Le malade a droit, surtout dans la souffrance, au respect de ses convictions et croyances.

Il ne doit pas être leurré. En particulier par le médecin qui doit dans tous les cas obtenir le consentement libre et éclairé de son patient comme cela est préconisé par le code algérien de déontologie médicale (article 44, paragraphe 3, Devoirs envers les malades). Le médecin a également l’obligation de respecter la dignité du malade (article 46, paragraphe 3, Devoirs envers les malades). Il ne doit pas mettre ses convictions religieuses et/ou politiques au service de son métier et profiter de la détresse du patient pour exercer son influence et son pouvoir. Les valeurs religieuses, philosophiques, politiques ne doivent pas, dans le cadre de l’exercice de la médecine, déterminer la conduite de l’acte thérapeutique. « La vocation du médecin et du chirurgien-dentiste consiste à défendre la santé physique et mentale de l’homme et à soulager la souffrance dans le respect de la vie et de la dignité de la personne humaine sans discrimination de sexe, d’âge, de race, de religion, de nationalité, de condition sociale, d’idéologie politique ou tout autre raison, en temps de paix comme en temps de guerre », art 7, chapitre Il, paragraphe 1 (devoirs généraux) du code algérien de déontologie médicale.

Nous avons maintenant un Conseil de l’ordre, nous avons aussi un code de déontologie médicale. Nous devons sans doute nous en réjouir. Il faut espérer que la loi sera appliquée chaque fois que cela sera nécessaire. La morale médicale est néanmoins l’affaire de tous les praticiens. Chacun doit se sentir concerné pour que les valeurs fondatrices de la pratique médicale reprennent leurs droits. Lutter contre les abus est une nécessité, mais cela ne suffit pas. Il faut restaurer/reconstruire l’image du médecin. Pour cela, le Conseil de l’ordre doit agir et l’ordre institutionnel réagir à chaque fois que la situation l’exige. Mais la restauration de l’image du médecin exige avant tout la fédération des « bonnes volontés ». Faute de quoi, tout demeurera vain. « La morale est fondée non sur la science mais sur la raison commune et la liberté », Kant (Fondements de la métaphysique des mœurs).

L’auteur est Psychiatre

Mahmoud Boudarène

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